Thaïlande: coup de colère de la Birmanie au sommet de Bangkok

Des tensions ont marqué le début de la rencontre régionale à Bangkok sur la crise des migrants en Asie du Sud-Est. Les délégués de la Birmanie et du Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies se sont accrochés à propos des Rohingyas musulmans, qui constituent une partie importante des migrants. Ces tensions soulignent la difficulté de la coopération sur la question complexe des migrations irrégulières.

De notre correspondant à Bangkok, Arnaud Dubus

Le représentant du Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies a demandé à la Birmanie devant les représentants des 17 pays présents d’assumer pleinement ses responsabilités en ce qui concerne la minorité ethnique des Rohingyas. Il a évoqué la question du refus des autorités birmanes de leur accorder la nationalité et les restrictions à leur liberté de mouvement.

Le représentant birman a vivement réagi en rétorquant qu’il ne servait à rien de désigner du doigt la Birmanie et que politiser la question de la migration entraverait la mise en place d’une solution. Ces échanges montrent la difficulté à établir une coordination entre les principaux pays concernés, y compris les deux pays d’origine, Bangladesh et Birmanie, et les agences internationales.

La Birmanie affirme qu’il n’y a pratiquement pas de Rohingyas parmi les migrants qui arrivent sur les rivages d’Asie du Sud-Est – une affirmation démentie par les interviews qui sont faites en Indonésie dans les camps provisoires de boat-people. Au-delà de ces tensions, le grand défi de la rencontre sera de mettre en place un mécanisme qui permette de coordonner les actions des différent pays concernés sur la durée.

Qui sont les migrants de l'Asie du Sud-Est ?

Cela fait dix ans au moins que dure cet exode, du golfe du Bengale vers la Malaisie et l'Indonésie, via la Thaïlande. Selon l'Organisation Internationale pour les Migrations 160 000 personnes sont parties ces trois dernières années. Elles seraient plus de 25 000 depuis début 2015, dont 300 sont mortes pendant la traversée.

Parmi ces migrants, des Bangladais qui veulent échapper à la misère, 40 à 60% de Rohingyas apatrides qui fuient les persécutions dont ils sont victimes en Birmanie. Cette minorité musulmane de près de 1 million de personnes vit dans le nord de l'Etat de l'Arakan. Sa présence sur ce territoire est attestée depuis des siècles, mais le gouvernement birman les considère comme des migrants venus illégalement du Bangladesh voisin. Leur liberté de mouvement est strictement limitée, tout comme leur accès à l'éducation ou à l'emploi.

La répression les a poussés à l'exil vers le Bangladesh voisin justement, à plusieurs reprises depuis les années 70. Ils y sont encore environ 250 000. Dans l'Arakan, de violents heurts les ont opposés aux bouddhistes en 2012, causant plus de 200 morts et 140 000 déplacés. L'origine des tensions avec les Arakanais remonte à la période coloniale, mais depuis quelques années c'est la montée de l'extrémisme bouddhiste en Birmanie qui provoque un regain d'intolérance et de violences religieuses.

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