Les autorités chinoises avaient jusqu’au 20 mai pour statuer sur la détention de Pu Zhiqiang, elles ont donc décidé d’aller jusqu’au procès. Que reproche Pékin à ce célèbre avocat chinois et militant des droits de l’homme ? D’abord ses amitiés et ses combats aux côtés de tous ceux qui luttent pour les libertés en Chine.
Voix de stentor, physique d’acteur, maître Pu a signé la charte 08 du prix Nobel de la paix chinois emprisonné, Liu Xiaobo, il a défendu l’artiste Ai Weiwei ou encore le blogueur des « écoles tofu » du Sichuan, Tuan Zuoren.
Plus récemment, il prenait le parti de son confrère emprisonné Xu Zhiyong, ou de la journaliste Gao Yu. Des célébrités, mais aussi des anonymes : une mère de famille enfermée en camps de travail, un écologiste tibétain, ou encore des cadres du Parti pris dans l’arbitraire de la campagne anticorruption du président chinois.
Messages sur les réseaux sociaux
Des cas que Pu Zhiqiang défendait également haut et fort en dehors des prétoires et notamment sur le réseau social Sina Weibo. Son compte Weibo (l’équivalent de Twitter en Chine) a été régulièrement censuré, l’avocat a eu douze comptes différents entre 2011 et le moment où il a été arrêté l’année dernière, juste avant le 25e anniversaire de la répression du Printemps de Pékin.
Mais les messages sont passés. Des textes souvent ironiques et sans ménagement vis-à-vis du pouvoir, rappelle le South China Morning Post à Hong Kong : « Du haut en bas de la pyramide, le pouvoir chinois ne peut survivre sans mensonge », ou encore, tout en critiquant les actes commis par l’armée nippone pendant la guerre, « si la Chine était gouvernée par le Japon, elle serait 10 000 fois mieux que maintenant ».
Plus grave peut-être encore aux yeux du pouvoir chinois, Pu Zhiquiang n’a pas hésité à condamner la répression des Ouïghours au Xinjiang ou des Tibétains sur les plateaux du Sichuan ou du Gansu.
Les charges retenues par le parquet sont liées à des opinions exprimées dans une trentaine de microblogs, « ce n’est pas acceptable », a fait savoir son avocat Shang Baojun. Ce dernier voit dans cette inculpation une menace à peine voilée vis-à-vis de la profession, visant à dissuader les autres avocats de s’intéresser aux cas jugés « sensibles » par le pouvoir. Pu Zhiqiang risque jusqu’à huit ans de prison.