Oubliée la crise financière des années 1990 ? L'économie indonésienne, en tout cas pour l'instant, se porte bien. Depuis dix ans, le pays affiche une croissance solide, autour de 6% annuels en moyenne. Une croissance robuste et rapide qui rend plus criant encore le déficit en infrastructures de l'archipel.
Premier enjeu : combler le déficit en infrastructures
C'est l'un des premiers défis économiques que le nouveau président devra relever : donner à cet immense archipel - le plus grand du monde - les routes, aéroports et ports dont il a tant besoin pour continuer à croître, et aussi bien sûr attirer de nouveaux investisseurs - étrangers notamment. Les investisseurs cherchent à quitter la Chine, devenue plus chère. La Thaïlande est par ailleurs instable politiquement. Alors, ils pensent à l'Indonésie, comme un tremplin à l'exportation, mais hésitent à franchir le pas en raison du manque d'infrastructures.
Des efforts ont été réalisés ces dernières années pour développer le transport aérien, mais les ports font défaut, et la flotte commerciale n'est pas à la hauteur des besoins du pays pour se déplacer et pour le transport de marchandises. Peu d'initiatives ont été prises, et ces dernières sont difficiles à mettre en œuvre. Un problème de gouvernance et de décentralisation.
Depuis le début des années 2000, les provinces ont en effet leur mot à dire, mais ont-elles seulement les moyens de mettre en place leurs décisions ? Et s'il fallait un exemple concret, il suffirait de se pencher sur le sort du métro de Jakarta. Etant l'une des villes les plus peuplées au monde, celle-ci est minée par le trafic et les embouteillages. L'étude initiale pour la construction d'un métro dans la capitale date de 1985. Pourtant, la première ligne ne devrait entrer en service qu'en 2018.
L'Indonésie a-t-elle les moyens de financer de nouvelles infrastructures ?
Jakarta pourrait investir, et peut être récupérer une partie des sommes assez considérables utilisées pour subventionner l'essence des Indonésiens. Pour garantir un prix bas au carburant, un héritage dans cet ancien pays exportateur de pétrole, l'Etat investirait 20% de son budget selon les analystes, soit 3,5 points du produit intérieur brut.
Un héritage qui favorise en réalité surtout la classe moyenne aujourd'hui, celle qui circule en 4x4 et grosses voitures. Chaque réduction des subventions à l'essence donne lieu à un bras de fer plus politique qu'économique, qui se traduit dans la rue par des manifestations. Les plus pauvres sont également concernés, puisqu'ils utilisent du kérosène et du fioul pour cuisiner. Les plus défavorisés perçoivent d'ailleurs des allocations pour compenser les baisses de subventions à l'essence.
La croissance rapide a, comme bien souvent, accru les inégalités. Les riches sont devenus plus riches et les pauvres un peu moins pauvres, mais plus nombreux : 12% des Indonésiens vivent avec moins de 1,25 dollar par jour, ils sont près de 40% à vivre avec moins de 2 dollars par jour, et beaucoup ont un travail informel. L'emploi sera un défi pour le nouveau président. En effet, la croissance que vit l'Indonésie aujourd’hui n'est pas créatrice d'emploi formel. Or la démographie est dynamique, la population jeune et c'est une force qui pourrait potentiellement se transformer en faiblesse.
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Ils sont deux pour un poste : le gouverneur de Jakarta, Joko Widodo, et l’ancien chef des forces spéciales Prawabo Subianto. Le premier incarne le renouveau de la classe politique. Issu d’un milieu modeste, il a connu une ascension rapide. Il est apprécié pour ses mesures sociales en faveur des plus démunis. Mais ses adversaires lui reprochent son absence d’expérience au niveau national et international.
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En face : Prawabo Subianto. L'ex-gendre du dictateur Suharto se présente comme l’homme fort dont le pays a besoin, celui qui saura préserver les intérêts économiques du pays face aux appétits étrangers. Controversé, il est accusé de violations des droits de l’homme pendant le conflit au Timor oriental, et a reconnu avoir ordonné l’enlèvement d’opposants pendant les dernières années de la dictature. Il bénéficie du soutien politique du président sortant.
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