Ces cinquante dernières années, plusieurs centaines de milliers de prisonniers politiques auraient péri dans les camps nord-coréens - travail forcé, famine organisée, exécutions, torture, viols, infanticides, entre autres. Aujourd'hui, 80 à 120 000 prisonniers politiques seraient encore détenus, et les horreurs qu’ils subissent sont aussi appliquées aux Nord-Coréens qui ne sont pas enfermés dans ces camps.
Autres crimes contre l’humanité énumérés par le rapport : les persécutions sur des bases politiques, raciales, religieuses et sexuelles, les transferts forcés de population, et la famine des années 1990, aggravée en toute connaissance de cause, selon le rapport, par des politiques destinées à soutenir le régime. Pour ce qui est des étrangers enlevés par Pyongyang depuis la fin de la guerre de Corée, l'enquête parle de « disparitions forcées exceptionnelles dans leur intensité » : pas moins de 200 000 personnes.
Les enquêteurs ont envoyé au président Kim Jong-un une lettre lui signifiant qu’il pourrait faire face à la justice internationale. Ils recommandent à l’ONU de saisir la Cour pénale internationale (CPI), ou de mettre en place un tribunal ad hoc. Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies décidera le mois prochain des suites à donner à ce rapport.
■ LES RÉACTIONS
« Maintenant, la communauté internationale sait », a expliqué ce lundi le chef des enquêteurs, qui demandent que « la communauté internationale accepte la responsabilité de protéger le peuple de la Corée du Nord » et saisissent la Cour pénale internationale pour que les responsables de ces atrocités rendent des comptes. Mais la Chine a déjà annoncé qu’elle mettrait son veto à toute saisine de la Cour concernant son allié : « Soumettre ce rapport à la CPI n’aiderait pas à résoudre la question des droits de l’homme », fait savoir Pékin. D’autant que le rapport rend Pékin potentiellement complice de crimes contre l’humanité lorsqu’il renvoie des exilés nord-coréens dans leurs pays.
Du côté des Etats-Unis, on presse Pyongyang de prendre « des mesures concrètes » pour améliorer cette situation et on « soutient pleinement les conclusions du rapport », sans pour autant parler d’une saisine de la Cour. Même chose du côté de la Corée du Sud : Séoul espère que ce rapport, auquel elle a contribué, augmentera « la prise de conscience de la communauté internationale », qu’elle se dit prête à aider pour améliorer la situation des droits en Corée du Nord. Mais toujours pas mention d’une saisine. On en saura peut-être plus d’ici le mois prochain, lorsque le Conseil des droits de l’homme des Nations unies aura décidé des suites à donner à ce rapport, qu’il avait commandé. Un rapport que Pyongyang a rejeté, sans surprise, « catégoriquement et dans son ensemble ».
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