Avec notre correspondant à Pékin, Stéphane Lagarde
C’est un petit sac en plastique qu’elle tient bien serré contre son manteau d’hiver, madame Hao Wei. A l’intérieur, des dizaines d’enveloppes en papier kraft, des demandes de réparation qu’elle compte envoyer aux officiels et un document tamponné signifiant son placement au lao jiao, le camp de travail de Masanjia.
«Quand je suis arrivée au camp de travail, raconte-t-elle, on m'a accusée d'avoir causé un dommage d'un montant de 145 yuans».
145 yuans pour une table en verre brisée lors d’une altercation avec les policiers dans un hôtel «prison noire» [lieux de détention illégal, ndlr]. Dix-huit euros, voilà pourquoi on allait en camps de rééducation par le travail jusqu’à maintenant en Chine.
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Madame Hao a été libérée le 30 décembre 2012. Depuis, elle a écrit un millier de lettres au chef de l’Etat Xi Jinping, lettres restées sans réponse. L’annonce de la suppression du goulag chinois est pour tous les ex-détenus une victoire, dit-elle : « En plus de cinquante ans d'existence, les camps de travail illégaux ont fait beaucoup de victimes, détruit beaucoup de familles. Maintenant, moi, j'ai gagné, on a gagné et en fait, j'aimerais bien retourner à Masanjia pour allumer des pétards».
Allumer les pétards devant son ancien camp de travail, un symbole de réjouissance et de nouveau départ pour les Chinois. Même si madame Hao craint que les camps ne soient remplacés par d’autres systèmes de détention arbitraire.