Inde: ouverture d'une enquête après l'intoxication alimentaire meurtrière d'écoliers

Dans l’Etat du Bihar, à l’est de l’Inde, 23 enfants ont trouvé la mort suite à ce qui ressemble à une intoxication alimentaire. Une trentaine d’écoliers sont toujours hospitalisés. Les repas servis mardi 16 juillet dans leur école sont visiblement à l'origine du drame. Une enquête a été ouverte. Ce jeudi, des milliers d’enfants de cet Etat ont refusé les repas proposés dans les cantines.

Les repas servis dans la plupart des écoles de l’Inde sont depuis quelques années gratuits, le gouvernement attire en quelques sortes les enfants à l’école, pour qu’ils étudient, grâce à ces repas. D'où un sentiment de trahison. D'autant que l’Etat de Bihar, où s’est déroulée cette tragédie, est un des Etats les plus pauvres de l’Inde.

Dans ce cas précis, une cinquantaine d'enfants scolarisés dans le village de Gandamal sont tombés malades après avoir pris leur repas à la cantine, ce qui a donné lieu à des scènes chaotiques dans les hôpitaux de la région où ils ont été emmenés : des enfants apathiques, sans réaction sur des brancards, et des parents en pleurs. Vingt-trois de ces enfants sont morts. Et dès mardi soir, des centaines d'habitants, furieux, ont saccagé un poste de police, brûlé des véhicules, brisé les vitres de cars scolaires : ils demandaient « des mesures fermes contre les fonctionnaires », considérés comme responsables.

Une enquête est en cours. Ce qu'on peut dire pour le moment, c'est que la nourriture servie mardi aurait contenu des traces de phosphate, un produit que l'on trouve dans les insecticides. La police a perquisitionné le domicile de la directrice de l'école. L'huile utilisée avait été achetée dans la boutique de son mari. Le couple est aujourd'hui en fuite.

Des repas scolaires gratuits depuis 1925 à Chennai

C’est la ville de Chennai, dans l'Etat du Tamil Nadu, dans le sud de l'Inde, qui a pu bénéficier en premier de ces repas scolaires gratuits en 1925. Mais ce n’est que dans les années 1960 que le programme a vraiment pris de l'ampleur, pour être adopté dans tout l'Etat, et gagner peu à peu, dans les années 2000 - après une directive de la Cour suprême -, la plupart des 29 Etats de l’Inde.

120 millions d'enfants en profitent aujourd'hui. Objectif : combattre du même coup la faim et l'illettrisme, en amenant les parents à mettre leurs enfants à l'école pour qu'ils bénéficient d'un repas gratuit. Evidemment, les parents s’exécutent, d'autant qu’en Inde, depuis six ans, le prix des denrées alimentaires flambent, et que selon les chiffres de la banque mondiale, 43% des enfants souffrent de malnutrition.

Scandales et intoxications alimentaires fréquents

Les débuts du programme ont été difficiles dans beaucoup d’écoles : ce sont les instituteurs qui tenaient lieu de cuisiniers, il n’y avait pas d’endroit où préparer les repas, pas d’ustensiles, pas d’eau non plus… Tout cela s’améliore peu à peu mais le niveau d’hygiène, trop faible, pose toujours problème.

Parfois, la nourriture est aussi tout simplement de mauvaise qualité. En 2012, dans l’ouest du pays, 130 enfants avaient dû être hospitalisés : leur repas avait été contaminé par l’escherichia coli, la fameuse bactérie intestinale. Il y a aussi des cas de détournements purs et simples de nourriture par le personnel des écoles.

Rétablir la confiance

Après l'empoisonnement de ce mardi, le gouvernement du Bihar a ordonné aux cuisiniers et aux directeurs d’école de goûter les repas avant qu’ils ne soient servis aux enfants. Mais rétablir la confiance va prendre du temps : des villageois ont déjà demandé que le programme de repas gratuits soit immédiatement stoppé.

Et les parents des écoliers décédés ont enterré trois d’entre eux sur le campus de l’école, seize autres dans les environs immédiats, pour que l’on n’oublie pas que leurs enfants sont morts suite à ce qui est, pour eux, une négligence de l’Etat.

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