Après l'Allemagne, les Etats-Unis et le Royaume-Uni, c'est la France et la Belgique que la délégation patronale chinoise visite. Ces entrepreneurs ont souvent bénéficié des avantages de la planification dans un pays communiste. Ils veulent aujourd'hui asseoir leur légitimité en économie de marché.
Et la France, pays du contrat social, les intéresse. Au menu de cette visite parisienne : les rencontres avec des chefs d'entreprise et des experts français, sur fond de guerre commerciale entre la Chine et l'Union européenne. Cette guerre qui, finalement, n'aura pas lieu. Car entre les panneaux solaires chinois taxés par Bruxelles et les importations de vins européens qui risquent d'être touchées en Chine, personne n'a intérêt à ce que ça aille plus loin.
Selon Jean-François Dufour, directeur du cabinet DCA-Analyse, « la Chine a été confrontée à la première fois où l’Union européenne a décidé de mettre des limites à l’expansion commerciale chinoise. La Chine, qui n’a pas été habituée à cette attitude de la part de l’UE - alors que les Etats-Unis l’ont déjà adoptée dans le passé -, a voulu se mettre en position de force pour négocier ».
A présent, ce schéma est en train de changer. Des négociations économiques sont en cours. L’Union européenne est le premier marché à l’exportation de la Chine. « Les exportations restent toujours déterminantes pour la croissance de la Chine qui n’a pas encore réussi un basculement vers son marché domestique. Mais cet énorme marché est important pour les entreprises européennes, confrontées à la stagnation de l’Europe aujourd’hui », conclut Jean-François Dufour.
Un changement difficile du modèle économique
La Chine veut changer son modèle économique. Elle souhaite passer du statut de pays sous-traitant à celui de pays producteur. Les entreprises chinoises reflètent cette nouvelle politique industrielle. Elles permettent de maintenir l'emploi dans les pays concernés, mais elles manquent encore de notoriété. Souvent la qualité de fabrication n’est pas au rendez-vous, et quand la qualité est là, c’est le fabricant qui n’est pas mondialement connu.
La Chine a besoin d’expertise. « Elle va investir dans les secteurs qui permettent le transfert de technologies », rappelle Marie-Françoise Renard, professeur à l'Ecole d'économie de l'université d'Auvergne et responsable de l’Institut de recherche sur l’économie de la Chine au sein du CERDI. Les secteurs concernés sont : la finance, l'assurance, l'industrie pharmaceutique, l'informatique, la haute technologie, les transports, les infrastructures, ou encore l'agroalimentaire. « Ce qui intéresse les entreprises chinoises c’est de produire en France, avec un savoir-faire français, des produits incluant des technologies qui n’existent pas encore en Chine », affirme Marie-Françoise Renard.
Il ne faut pas craindre la Chine, elle suit le cours des autres pays dans le monde. En revanche, il faut poser des conditions. Et Marie-Françoise Renard de conclure : « On est dans une économie globalisée pour les entreprises qui sont à la recherche des marchés dans le monde entier. Il est important de définir des règles du jeu, et que la Chine respecte ces règles du jeu. Et notamment qu’on lui pose les conditions qu’elle-même pose aux entreprises européennes sur son territoire. » C’est ainsi que la logique de la concurrence internationale que l’on connaît déjà pourrait s’imposer sainement.
La prochaine convertibilité du Renminbi (RMB)
Si les entreprises françaises disposent d'un savoir-faire dont les Chinois ont besoin, elles doivent se préparer à la convertibilité de la monnaie chinoise. Selon les autorités chinoises, le yuan, autrement appelé le Renminbi (RMB), littéralement « la monnaie du peuple », sera convertible en 2018.
Régis Barriac, directeur de l'international et du marché des entreprises chez HSBC France, rappelle que jusqu’en juin 2012 « seules 60 000 entreprises chinoises étaient autorisées à traiter des opérations en RMB, et cette restriction d’une liste fermée a été finalement supprimée. Aujourd’hui, l’ensemble du tissu chinois peut vendre ou acheter en monnaie locale. C’est pourquoi, les entreprises françaises ont tout intérêt à avoir des offres en parallèle en RMB, c’est pour elles une immense perspective d’avoir de nouveaux clients. Et si elles s’installent en Chine de vendre directement au client final. »
Aussi, les classes moyennes chinoises comptent 200 millions de personnes. Un marché énorme qui n'attend que de consommer.