Le président afghan envisage une censure des médias «non islamiques»

En Afghanistan, le pouvoir veut interdire les programmes non islamiques. Le président afghan Hamid Karzaï a annoncé qu'un décret serait pris en ce sens dans les jours prochains. Principale cible des autorités afghanes : les séries, films ou clips « vulgaires, obscènes, contre l'islam et contre la morale sociale », selon les termes du futur texte.

Avec notre correspondant à Kaboul,

A l'origine, l'idée est portée par le conseil des oulémas. Cette institution regroupe des imams et mollahs afghans et n'est pas connue pour être très libérale. Ce conseil demande depuis des mois un durcissement de la loi sur la télévision. Il estime que certains programmes incitent à la prostitution.

Les représentants de ce conseil ont été reçus par le président afghan qui a donc suivi leur avis. Le Conseil des ministres a publié un texte qui va sanctionner les programmes radio et télé non islamiques. Interrogé sur le sujet, un conseiller du ministre la Culture confirme que les feuilletons indiens et certains clips afghans mettant en scène des danseuses « à demi-nues » seront bientôt interdits.

Les chaînes étrangères prises pour cible

En allumant la télévision afghane, vous ne verrez pas d'épaules, de jambes et encore moins de décolletés de femmes. Ces images sont soit floutées soit coupées au montage quand elles ne sont pas tout simplement absentes des séries ou films tournés en Afghanistan.

Il existe une commission de la censure qui vérifie l'ensemble de ce qui est diffusé dans le pays. Avec ce futur décret, ce sont aussi les chaînes étrangères qui sont visées. A Kaboul et dans les grandes villes afghanes, on peut recevoir les chaînes satellites en payant un abonnement et en faisant installer une parabole. On peut ainsi regarder une centaine de chaînes indiennes, américaines ou arabes.

Et si aucun de ces programmes ne pouvait être interdit au moins de 18 ans, ces chaînes jouissent d'une liberté qui ne semble pas plaire à tout le monde. Le ministère de la Culture avait déjà tenté de les faire interdire. Cela risque maintenant d'être possible avec cette décision.

Un signe adressé aux talibans

Il existe en Afghanistan une centaine de chaînes de télévision privées, cent-cinquante radios et près d'un millier de journaux. Un vent de liberté souffle depuis 2001 et la chute du régime taliban, mais les extrémistes religieux menacent désormais le pouvoir à Kaboul.

On sait que le président afghan aimerait entamer des discussions avec eux, mais les talibans refusent pour le moment toujours de se compromettre avec la « marionnette des Etats-Unis », comme ils l'appellent. Certains analysent donc cette décision comme un nouveau message en faveur des extrémistes religieux.

Ce n'est pas le premier signe du pouvoir afghan dans leur direction : Hamid Karzaï avait affirmé, il y a près d'un an, que la femme est « secondaire ». Un discours qui avait dû ravir à coup sûr les plus conservateurs.

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