Avec notre correspondante à Kaboul, Marie Normand
Les soupçons se portent sur un certain Abdul Saboor, un officier afghan des services du renseignement, habilité à pénétrer dans ces lieux ultra-sécurisés du ministère de l'Intérieur, là où les deux conseillers militaires américains ont été retrouvés assassinés d'une balle dans la tête. Une dispute verbale aurait éclaté entre les deux officiers américains et leur collègue afghan au sujet des Corans brûlés. Les Occidentaux auraient qualifié le Coran de mauvais livre. L'officier afghan se serait énervé et a tiré.
Selon une chaîne d'information afghane qui cite des sources ministérielles, l'homme de 25 ans entré au ministère en 2007 comme chauffeur, aurait été entraîné, puis promu.
Après les assassinats de ce samedi, le suspect, qui aurait fait une partie de ses études au Pakistan, a disparu. Il aurait au même moment signé le registre d'entrée et de sortie du ministère de l'Intérieur. Depuis, il est activement recherché : sa maison dans la province de Parwan, au nord de Kaboul a été passée au peigne fin, sa famille interrogée et un de ses proches a aussi été arrêté dans la capitale.
Hamid Karzaï, dans une conférence de presse ce dimanche 26 février 2012, n'a pas donné plus d'éléments, refusant même de confirmer la nationalité du tireur.
Revenant sur l'incident de Bagram, le président afghan a demandé que les militaires américains responsables de l'incinération des Corans soient jugés. Il a aussi renouvelé son appel au calme, même s'il juge la colère des Afghans « légitime ».
Une grenade sur une base de l'Otan
C'est en marge de violentes manifestations dans la province de Kunduz au nord du pays qui ont fait un mort parmi les manifestants ce dimanche qu'une grenade a été lancée sur une base des forces spéciales américaines. Une attaque qui a blessé au moins sept soldats de la coalition. Cinq protestataires ont été arrêtés. Selon la police locale, le visage de ces manifestants a changé par rapport aux jours précédents. Elle parle d'agitateurs, certaines personnes seraient désormais armées.
Kunduz est la seule province où des violences mortelles ont été recensées dimanche. Déjà samedi, c'est là que cinq manifestants avaient perdu la vie dans l'attaque d'un complexe de l'ONU. Ailleurs dans le pays, les mouvements de rue semblent s'apaiser, mais la tension est toujours très vive.
Le bilan des manifestations anti-américaines qui ont éclaté mardi est aujourd'hui de 30 morts et au moins 200 blessés. Par ailleurs, l'Otan a décidé de retirer ses conseillers de tous les ministères afghans.
Plusieurs centaines de conseillers américains travailleraient au sein de l'administration afghane, soit au titre des forces de l'Otan, soit au titre de la coopération bilatérale. Ils travaillent dans de multiples domaines de la logistique à l'entraînement aux armes en passant par la stratégie militaire.
La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton s'est, elle aussi, exprimée depuis Rabat. « La violence doit cesser, dit-elle, il faut continuer le dur travail pour construire un Afghanistan plus en paix et en sécurité ». Un travail difficile depuis plusieurs semaines et particulièrement depuis l'incident des Corans brulés. Car les attaques de militaires afghans contre des soldats étrangers se multiplient. Preuve de cette crise de confiance, après Londres, Berlin et Paris viennent de rappeler leurs agents travaillant dans des ministères afghans.