Un mois après avoir été critiqué de toutes parts par la communauté internationale sur sa gestion environnementale, le président d’extrême-droite Jair Bolsonaro sera l’un des premiers chefs d’État à prononcer un discours à l’ouverture de l’Assemblée générale de l’Organisation des nations unies (ONU) mardi 24 septembre.
Mais Brasilia est encore sous les feux des critiques pour sa gestion des incendies en Amazonie. L’ONU a opposé son veto à tout discours du gouvernement brésilien lors de la conférence sur le climat qui doit avoir lieu la veille, lundi 23 septembre à New York, selon le quotidien Folha de São Paulo. Le pays avait pourtant l’intention de prendre la parole, selon un diplomate cité par le journal.
« Le Brésil n’a présenté aucun plan renforçant son engagement pour le climat », a justifié Luiz Alfonso de Alba, envoyé spécial du secrétariat-général de l’ONU. Les États-Unis, l’Arabie saoudite, le Japon, l’Australie et la Corée du Sud ont également été écartés sous les mêmes critères. Le président français Emmanuel Macron, qui avait échangé des mots peu diplomatiques avec Jair Bolsonaro, participera à la conférence, vue comme une « occasion d'affirmer notre ambition climatique », selon le palais de l’Élysée.
Plus de 200 fonds d’investissement appellent à des mesures fortes
Brasilia a, certes, accepté une partie de l’aide internationale destinée à combattre les feux de forêts. Mercredi 18 septembre, 230 fonds internationaux d’investissement ont rajouté une pression supplémentaire sur le gouvernement brésilien et ont exigé des mesures pour lutter contre les incendies, « dus en partie à la déforestation », lit-on dans un communiqué commun. Grande partie de ces groupes détiennent des parts d’entreprises brésiliennes ou de multinationales présentes au Brésil.
Ces fonds, qui gèrent environ 16 000 milliards de dollars – soit neuf fois le PIB brésilien -, demandent également aux entreprises de « redoubler leurs efforts et démontrer un attachement clair pour éradiquer la déforestation dans leurs opérations et chaînes d’approvisionnement ».
Cette prise de position pourrait secouer les entreprises qui refusent tout effort, alors que d’autres ont déjà pris des mesures concrètes : le 5 septembre dernier, le géant du prêt-à-porter H&M a annoncé suspendre ses achats de cuir au Brésil pour « les liens » entre les incendies et « la production bovine », avait annoncé l’entreprise dans un communiqué.
En réponse à l'appel de ces fonds d'investissement, la présidence brésilienne a affirmé adopter « tous les efforts » pour « faire face à cette crise » environnementale.
Aucun chiffre précis sur la lutte contre les incendies, qui se poursuivent
Depuis le 26 août, le gouvernement brésilien a répété que les incendies sont « sous contrôle » et a même interdit début septembre les brûlis des fermiers pendant 60 jours.
Cependant, à part des campagnes de communication, Brasilia n’a communiqué aucun chiffre clair sur les opérations de combat des feux, se contentant de pointer une chute des « foyers de chaleur » ou de diminuer l’importance des données de l’Institut national de recherche spatiale (INPE). Brasilia est allé au point de remercier le directeur de cet organe chargé officiellement de la surveillance de la déforestation et des incendies.
De plus, les incendies se poursuivent, selon les chiffres de l’INPE cités par le quotidien Estadão, alors qu’un record de départs de feu avait déjà été enregistré en août, au nombre de 39 117 – soit plus du double d’août 2018. « En vérité, il y a une grande part d’improvisation et on ne sait pas vraiment ce qu’il se passe en détail », explique Ricardo Abad, expert à l’institut Socioambiental, ONG de défense de l’environnement, cité par le Monde. La qualité et la quantité des moyens mis à l’œuvre font débat.
Les orpailleurs entendus par de nombreux poids lourds du gouvernement
À l’encontre du discours officiel de défense de l’environnement, le gouvernement a également rencontré mercredi 18 septembre un groupe de représentants d’orpailleurs actifs dans la région, mécontents des opérations des agences officielles de combat à la déforestation, selon la version brésilienne du quotidien El Pais. Les très nombreux poids lourds du gouvernement, dont le numéro 2 Onyx Lorenzoni et le ministre de l’Environnement Ricardo Salles, ont promis dans un communiqué de chercher « une solution structurée et à long terme aux demandes des orpailleurs ».
Alors que la France et l’Autriche veulent s’opposer à l’accord entre l’Union européenne et le marché du Mercosur pour des raisons environnementales, Jair Bolsonaro va-t-il réussir à regagner la confiance de la communauté internationale avec son discours devant l’ONU, malgré les signes et agissements de son gouvernement ? Luiz Alfonso de Alba a quant à lui résumé l'état d'esprit de l'ONU mercredi 18 septembre : « Nous n’avons plus le temps pour des discours ; nous devons nous concentrer sur l’action ».