Amazonie: Bolsonaro autorise l'envoi de l'armée pour lutter contre les incendies

Le président brésilien s’est exprimé dans un discours diffusé à la télévision, vendredi soir. Il a décidé d’envoyer l’armée pour combattre les feux de forêt et la déforestation illégale, une gestion de la crise en urgence alors que plusieurs régions se sont déclaré en état d’alerte.

Avec notre correspondant à Sao Paulo,  Martin Bernard

Par décret, le président d'extrême droite a autorisé à partir de samedi et pour une durée d'un mois les gouverneurs des États concernés à recourir à l'armée pour « l'identification et la lutte contre les foyers d'incendie », ainsi que pour « des actions préventives et répressives contre les délits environnementaux ».

« En tant que militaire et homme public, je respecte et j’aime profondément l’Amazonie, a déclaré le président brésilien dans une allocution télévisée. La protection de la forêt est notre devoir. Et c’est pour cela que nous devons combattre la déforestation et toute autre activité criminelle qui met notre Amazonie en danger. »

Jair Bolsonaro a donc autorisé « la mise en place d’une opération de garantie de la loi et de l’ordre : une opération militaire environnementale ». Une opération « avec l’usage extensif de personnel et de matériel de l’armée, et d’autres organes de sécurité, pour combattre les activités illégales, et l’avancée des incendies dans la région », a-t-il prévenu.

Bolsonaro répond aux pressions

Le président brésilien a également répondu aux critiques venues du monde entier, et averti les pays du G7 que cela ne justifiait pas des sanctions économiques contre les exportations brésiliennes.

« Nous allons agir pour contrôler les incendies en Amazonie. Mais il faut rester serein. Plusieurs pays développés n’ont pas respecté leurs engagements dans le cadre de l’Accord de Paris. Mais d’autres pays se sont dits solidaires avec le Brésil, ont offert des moyens pour lutter contre les incendies, et ils se sont dits prêts à représenter la position brésilienne lors du G7. Les incendies de forêt existent dans le monde entier. Cela ne peut servir de prétexte pour de possibles sanctions internationales. Le Brésil continuera à être, comme il l’a fait jusqu’à aujourd’hui, un pays ami de tous, et responsable de la protection de sa forêt amazonienne. »

De son côté, le chef indien Raoni a demandé, vendredi 23 août, l'aide de la communauté internationale pour contribuer à « faire partir le plus vite possible » le président brésilien Jair Bolsonaro, qu'il juge responsable des graves incendies en Amazonie. « C'est une catastrophe ce qu'il est en train de faire avec nous », a poursuivi le chef de 89 ans qui se bat pour le respect des droits des communautés indigènes.

« C'est (lui) qui excite ces gens, comme les fermiers. Ils l'écoutent. Ils pensent qu'ils ont tous les droits et se mettent à brûler les forêts, a-t-il ajouté. Il en va ainsi pour les coupeurs de bois, les chercheurs d'or. Ils se lâchent tous car sa parole les pousse à détruire la forêt beaucoup plus vite. »

De grands rassemblements

Aux cris de « Sauvez l'Amazonie », des manifestations ont rassemblé plusieurs milliers de personnes à Rio de Janeiro et à Sao Paulo, rapporte notre correspondant sur place, Martin Bernard. « J’ai ressenti une immense tristesse, un sentiment d’impuissance. On voit que ça brûle. Et de chez soi, on ne peut rien faire. C’est une sorte de désespoir. J’ai ressenti une très grande angoisse. Et c’est là que j’ai décidé de prendre position », dit une jeune femme.

Les jeunes s’engagent en faveur de l’Amazonie et contre le gouvernement actuel. « Aujourd’hui, je suis venu défendre l’environnement. C’est une question de survie de l’humanité. La cause environnementale a toujours été un problème chronique et historique au Brésil. Mais aujourd’hui, on voit des politiques publiques avec un parti pris explicite pour la dégradation de l’environnement », assure un jeune homme.

Pas d'union nationale

En pleine crise de l’Amazonie, le Brésil est encore loin de l’union nationale. Un peu en retrait de la manifestation, un homme n’hésite pas à critiquer la politisation du mouvement : « Ce n’est pas vrai, le Brésil n’est pas en train de s’enflammer. C’est ce qu’il a dit : “Notre maison prend feu ! Non, c’est un mensonge qu’ils emploient pour combattre un gouvernement qui veut mettre un terme à la corruption” ».

D'autres rassemblements ont aussi eu lieu devant les ambassades et consulats du Brésil dans le monde, à l'appel de nombreuses ONG. Parmi celles-ci le mouvement de la jeune Suédoise Greta Thunberg, Fridays for Future. Dans le « poumon de la planète », quelque 700 nouveaux feux ont été enregistrés en 24 heures jeudi, selon les chiffres communiqués vendredi par l'Institut national de recherche spatiale (INPE).