Avec notre envoyée spéciale à Cucuta, Marie Normand
La ville de Cucuta est en ébullition. C’est dans cette ville colombienne, à la frontière du Venezuela, qu’aura lieu ce vendredi 22 février un grand concert caritatif organisé sur le pont Tienditas, aujourd’hui fermé. C’est là, dans des entrepôts, qu’est stockée depuis plusieurs jours la plus grande partie de l’aide internationale à destination du Venezuela.
Le président Maduro refuse, pour l’instant, de la laisser entrer sur son territoire : elle serait prétexte, selon lui, à une intervention militaire des Etats-Unis. Ce concert très médiatisé vise à récolter des fonds pour le Venezuela, mais aussi à recruter des bras pour réussir à faire entrer cette aide côté vénézuélien.
250 000 personnes attendues
Depuis la veille, la ville est prise d’assaut par les journalistes, les délégations étrangères et les équipes des artistes internationaux qui se produiront ce vendredi. Un tel événement est inédit à Cucuta : 250 000 personnes y sont attendues. Le maire a même décrété pour l’occasion un jour férié.
Parmi les 25 artistes présents, on peut citer Juanes, Luis Fonsi, le chanteur de Despacito, ou encore Peter Gabriel, ancien du groupe Genesis. Ils ont répondu à l’appel de Richard Branson, le fondateur du groupe Virgin, et de Juan Guaido reconnu président par intérim du Venezuela par une cinquantaine de pays.
A quelques mètres du pont Tienditas, des bénévoles tiennent un barrage filtrant. Ils ne laissent passer que les véhicules de la défense civile colombienne et des camions régies. Près de la scène, des campings gratuits ont été ouverts spécialement pour les personnes venues du Venezuela. « Bien sûr qu’on va au concert ! », s’exclame un étudiant de l’Université de San Cristobal, qui vient de s’y installer. Et d'ajouter : « Mais notre mission principale, c’est de contribuer à l’entrée de l’aide humanitaire ».
Un contre-concert organisé par Nicolas Maduro
L’objectif est d’utiliser les spectateurs, le lendemain du concert, pour faire entrer l’aide humanitaire côté vénézuélien, de l’autre côté du pont. A cet endroit, un concert rival est pourtant organisé tout le week-end par le gouvernement du président Nicolas Maduro. Les têtes d’affiches ne sont pas encore connues, mais le mot d’ordre, si : « Pas touche au Venezuela ». Deux conteneurs et un camion-citerne ont été placés au milieu du pont par les autorités de Caracas au début du mois pour empêcher l’aide humanitaire de passer.
Un risque de tension qu’évacue totalement Fernan Ocampo, l’un des organisateurs du concert côté colombien. « Il n’y a qu’un seul concert, affirme-t-il. Ce que nous avons compris, c’est que de l’autre côté, aucun artiste ne veut chanter. Donc notre concert sur le pont Tienditas, c’est le seul, avec plus de 25 artistes. Et on se félicite du nombre de dons reçus du monde entier. » L’objectif avancé par le milliardaire britannique Richard Branson est de récolter, sur le site internet de l'événement, 100 millions de dollars en 60 jours.
La peur latente d’un conflit armé
La ville de Cucuta profite pleinement de cette attention internationale, expliquent les commerçants. Mais ces derniers s’inquiètent aussi de la possibilité d’un dérapage et d’un affrontement armé entre les deux pays.
Autre source d’inquiétude : la fermeture de l’autre point de passage entre les deux pays, le pont Simon Bolivar, point névralgique du commerce de la ville. Une menace brandie par Nicolas Maduro, qui a déjà ordonné la fermeture de la frontière avec le Brésil.
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