Etats-Unis: une troisième accusation d’abus sexuels fragilise le juge Kavanaugh

A la veille de son audition devant la commission judiciaire du Sénat, le candidat de Donald Trump à la Cour suprême, Brett Kavanaugh a été la cible mercredi 26 septembre d'une nouvelle accusation d'abus sexuel.

Les trois pages de la déclaration de Julie Swetnick ont été publiées sur Twitter par son avocat, Michael Avenatti. Cette femme, qui vit à Washington et a travaillé pour plusieurs ministères américains, lance des accusations très graves contre le juge choisi par Donald Trump pour siéger à la Cour suprême : il ne s’agit plus de tentative de viol ou d’agression sexuelle, mais de viols répétés, commis en groupe sur des victimes au préalable droguées ou alcoolisées. « Brett Kavanaugh et d’autres tentaient de saouler et de désorienter les filles afin de pouvoir les violer en réunion », écrit-elle. « Je me souviens très bien de ces files de garçons qui patientaient en attendant leur tour devant une chambre où se trouvait une fille. Brett Kavanaugh faisait partie de ces garçons. » Julie Swetnick affirme avoir elle-même été victime de l’un de ces viols, mais n’écrit pas de manière catégorique que Brett Kavanaugh figurait parmi ses agresseurs. Elle soupçonne avoir été droguée au préalable et déclare avoir raconté à l’époque à au moins deux personnes ce qui lui était arrivé. Pour donner du crédit à ses propos, Julie Swetnick précise qu’elle accepte de s’exposer au crime de parjure, qui sanctionne tout mensonge dans une déclaration sous serment.

Un avocat à la réputation sulfureuse

Les républicains ont aussitôt émis des doutes sur le témoignage de Julie Swetnick et dénoncé une intervention de dernière minute destinée à faire dérailler le processus de nomination du juge Kavanaugh. Michael Avenatti, l’avocat de Julie Swetnick, explique avoir dû s’assurer que la sécurité de sa cliente soit garantie avant de pouvoir révéler son identité au public. Il affirme avoir transmis son témoignage à la commission judiciaire du Sénat dès dimanche dernier, sans avoir reçu de réponse.

Michael Avenatti est un avocat à la réputation sulfureuse, régulièrement convoqué sur la scène médiatique et qui envisage de se lancer dans la course à la Maison Blanche en 2020. « Avenatti est un avocat de troisième zone habitué aux fausses déclarations », a commenté Donald Trump sur Twitter après les accusations portées contre le juge Kavanaugh. Ce n’est pas la première confrontation entre les deux hommes : Michael Avenatti est l’avocat de Stormy Daniel, cette actrice de films pornographiques payée en échange de son silence sur une liaison qu’elle affirme avoir eu avec l’hôte de la Maison Blanche.

Démenti formel

Brett Kavanaugh a quant à lui démenti fermement ces nouvelles accusations venues, dit-il, de « la quatrième dimension ». « C’est ridicule, je ne connais pas cette personne. Cela n’est jamais arrivé », a-t-il fait savoir dans un communiqué transmis par la Maison Blanche. Le juge a opposé le même démenti formel aux accusations de Deborah Ramirez qui l’avait accusé, dans un article paru dimanche dernier, d’avoir exhibé son pénis près de son visage lors d’une soirée arrosée, cette fois à l’université de Yale.

Dans la déclaration préliminaire qu’il doit faire devant la commission judiciaire du Sénat ce jeudi, où il dément farouchement tout type d’agression sexuelle, Brett Kavanaugh reconnaît cependant avoir bu de manière exagérée à plusieurs reprises pendant sa jeunesse. Un aveu qui tranche avec les propos qu’il a tenus lors d’une interview accordée à Fox News en début de semaine, où il se présentait avant tout comme un jeune homme préoccupé par ses études, le sport, et la fréquentation de son église. Lors de cet entretien accordé à la chaîne de télévision préférée de Donald Trump, le juge avait même cru bon de préciser qu’il était vierge au lycée « et pendant de longues années qui ont suivi ».

« Je croyais qu’il allait me violer »

Les démocrates ont demandé le report de l’audition prévue ce jeudi à la suite des révélations de Julie Swetnick, mais elle a été maintenue. Brett Kavanaugh ne sera confronté qu’à l’une de ses trois accusatrices devant la commission judiciaire du Sénat : Christine Blasey Ford, professeur de psychologie à l’université. Le déroulé de l’audition a été fixé au terme de longues négociations : comme dans un procès, c’est l’accusation qui parlera en premier, avec le témoignage de l’universitaire qui disposera du temps qu’elle souhaite pour raconter cette soirée alcoolisée de 1982, où elle assure avoir subi une tentative de viol de la part de Brett Kavanaugh, alors âgé de 17 ans. « Je croyais qu’il allait me violer », entend déclarer Christine Blasey Ford, selon la presse américaine qui a obtenu le texte de son intervention. « Je ne suis pas ici aujourd'hui parce que je le veux. Je suis terrifiée », compte préciser l’universitaire. « Je suis ici parce que j'estime qu'il est de mon devoir civique de vous dire ce qui m'est arrivé lorsque Brett Kavanaugh et moi étions au lycée ».

Une audience suivie par Donald Trump

Tous les républicains qui siègent à la commission sont des hommes et les sénateurs, qui craignaient d’être accusés de sexisme, ont choisi de nommer une femme extérieure au congrès pour mener les débats : Rachel Mitchell est procureur dans l’Arizona et spécialiste des agressions sexuelles. Elle interrogera tour à tour Christine Blasey Ford et Brett Kavanaugh. Les sénateurs des deux partis disposeront chacun de cinq minutes pour poser à leur tour des questions aux deux protagonistes. Lors d’une conférence de presse donnée en marge de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, le président américain a indiqué qu’il regarderait l’audition, qui sera diffusée en direct à la télévision. Donald Trump a réitéré son plein soutien à Brett Kavanaugh, mais a déclaré qu’il « n’excluait pas de changer d’avis » si le témoignage de Christine Blasey Ford lui paraissait convaincant. Le président de la commission judiciaire du Sénat entend néanmoins aller vite dans le processus de confirmation de la nomination du juge : il a annoncé qu’un vote pourrait se tenir dès vendredi.

 

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