De notre correspondante à Buenos Aires,
« MuMalapp » a été créée par MuMaLa, un collectif féministe dont le nom complet est Mujeres de la Matria Latinoamericana (Les femmes de la « Matrie » latino-américaine). Ce sont des activistes qui dénoncent les violences faites aux femmes et demandent à être traitées sur un pied d’égalité avec les hommes.
En Argentine, un pays à la réputation très machiste, leur combat est difficile mais de plus en plus entendu dans la sphère publique. Plusieurs lois ont été votées ces dernières années pour garantir le respect des droits des femmes. A Buenos Aires, la capitale, un texte a par exemple été adopté fin 2016 pour punir le harcèlement de rue. Cette loi prévoit en théorie des amendes allant jusqu’à 1 000 pesos, soit 40 euros. Mais dans les faits, elle est très peu appliquée, puisque la majorité des femmes n’ose pas porter plainte. Les amendes n’effraient pas non plus vraiment les hommes, puisque selon un récent sondage du quotidien La Nación, plus de 62% des Argentins estiment que les femmes se sentent flattées lorsqu’on leur fait une remarque dans la rue.
Véritable carte du harcèlement
L’utilisation de l’application est simple : elle se télécharge sur les téléphones Androïd et fonctionne sur le principe de la géolocalisation. Concrètement, cela veut dire que les femmes peuvent signaler en temps réel et de façon anonyme une agression ou une situation désagréable. Elles font une petite description des faits, donnent leur âge, et leur localisation s'affichera ensuite sur une « carte du harcèlement ». L’application a été lancée il y a seulement 3 jours, mais plus de 1 000 personnes l’ont déjà téléchargée. La carte du harcèlement montre des dénonciations partout à travers l’Argentine, et même dans certains pays voisins comme la Bolivie et le Chili.
Faire ces dénonciations à l’application n’empêche pas de les faire également à la police. L’idée MuMalapp est, d’une part, de créer un véritable outil statistique. Et d’autre part de rendre plus visible le harcèlement, de montrer que les femmes le considèrent bien comme un problème, et qu’il peut arriver à chaque coin de rue, dans les quartiers riches comme dans ceux défavorisés. Les créatrices de l’application espèrent une mobilisation massive des femmes qui permettrait d’en finir avec la culture du « piropo ». Le mot veut dire « compliment » et est utilisé bien à tort pour qualifier les réflexions que les Argentines reçoivent régulièrement. Toujours selon l’enquête du journal La Nación, seul 1 % des femmes interrogées se dit « satisfaite » après une réflexion lancée dans la rue. Les 99 % restants sont partagées entre le dégoût, la peur et la colère.
Notons enfin que l’application « MuMaLapp » vise à soutenir une proposition de loi étudiée en ce moment par le Congrès argentin. Proposition qui veut durcir la législation actuelle et propose de sanctionner le harcèlement de rue avec des amendes allant jusqu’à 1 000 euros. Un texte également accessible en intégralité sur l’application.