Irma se trouve actuellement devant les côtes dominicaines et devrait toucher Haïti cette nuit. Le pays est toujours en alerte rouge. Même si le centre de l'ouragan ne s'abattra pas sur Haïti, il faut s'attendre à des fortes pluies et des rafales de vents, peut-être un peu moins importantes que prévu.
Le directeur de l'ONG Care France, joint par RFI, recommande aux habitants du littoral « d’écouter les consignes des autorités locales, de s’y soumettre et de vraiment évacuer les zones ». Autre recommandation : « faire des provisions et s’assurer que l’on a de quoi survivre pendant quelques jours ». Karl Paul se préoccupe en particulier du département du Nord-Ouest, zone « la plus à risque ». Elle est « très déboisée, très sèche et donc très très aride », indique l'humanitaire. Selon lui, le pays est néanmoins mieux préparé qu'il y a un an, pour l'ouragan Matthew.
Mieux préparé, peut-être, mais sans doute pas suffisamment, s’inquiète le directeur du centre européen de crise et de coordination, Antoine Lemasson. « Haïti n’est pas un pays qui est toujours très bien préparé, qui a dû faire face ces dernières années à des séries de cyclones et dont la résilience s’affaiblit chaque année. »
Antoine Lemasson explique que le centre européen de crise se prépare « activement » et a d’ores et déjà déployé « des experts en eau et assainissement ou en logistique, qui pourront répondre tout de suite après le désastre. »
Des abris d'urgence encore vides
Sur place, les effets de l'ouragan commencent à se faire sentir. Au Cap Haïtien, la pluie est plus soutenue et le vent se lève. Les autorités ont finalement ouverts les abris d'urgence mais alors que la météo se détériore minute après minute, ils ne sont encore qu'une poignée à avoir pris refuge.
Les gradins du gymnasium du Cap Haïtien sont en effet encore déserts, constate notre correspondante, Amélie Baron. Plus de 5 000 personnes peuvent s'y réfugier, mais alors que la pluie a commencé à tomber sur la ville, les scouts haïtiens chargés de l'accueil des familles sont désoeuvrés.
Erna Michel fait partie des rares à avoir fait preuve de prudence. Elle se dit prête à passer une journée ou deux sur place avec ses 6 enfants. « J'ai pris la main de ma plus jeune fille et j'ai dit à tous “déplaçons-nous avant que l'eau vienne nous envahir”, explique cette femme de 52 ans. J'ai verrouillé la porte avec cadenas et je suis partie. Même si des voleurs viennent tout prendre, ça n'est pas important : on sauve nos vies. On est allongé sur du ciment froid, c'est notre seul problème. Même si on va avoir faim, on va vivre plutôt que de trouver une horrible mort dans l'eau, que la rivière déborde et nous emporte avec elle. Ceux qui sont bornés et refusent d'évacuer c'est leur problème. Moi, j'ai fait mon choix. »
« On ne peut pas les empêcher de sortir »
Dans les zones à risques, en bord de mer et le long de la rivière, les riverains peuvent constater par eux-mêmes la montée du niveau des eaux, alors que les pluies sont encore limitées. Mais la grande majorité dit encore attendre avant d'éventuellement partir de chez eux, contre toutes les consignes des autorités.
« Beaucoup d'habitants sont des Saint-Thomas, ils attendent de voir pour croire, ils refusent de se déplacer et restent chez eux, estime la maire du Cap Haïtien, Yvrose Pierre. La pluie n'est pas encore très forte et le vent n'est pas encore fort donc les gens vont et viennent, certains sont au marché pour chercher leur pain quotidien parce qu'ils vivent au jour le jour : on ne peut pas les en empêcher de sortir. »
L'élue locale assure avoir tout fait pour avertir ses administrés et lance un appel à suivre les consignes. « On demande à tous ceux qui habitent en bord de rivière, même ceux en dehors de la commune de Cap Haïtien, ceux qui habitent au bord de la mer : quittez ces zones afin de sauver votre vie. Ceux qui vont mourir, ces gens seront responsables de leurs cadavres parce qu'on aura tout fait pour les évacuer. »
Prochaine direction, Cuba et la Floride
Après Haïti, Irma se dirigera vers Cuba où les autorités, toujours très réactifs face aux intempéries, ont déjà pris des précautions. Près de 10 000 touristes étrangers ont été placés en lieu-sûr.
En alerte également, les autorités américaines, car l'ouragan est attendu en Floride samedi, donc après-demain. Le gouverneur de l'Etat de Géorgie vient d'ordonner l'évacuation obligatoire des zones côtières. En Floride, plus de 200 000 personnes ont été appelées quitter le littoral.
A l’heure actuelle, plus d'un million de personnes ont d'ores et déjà été affectées par Irma, un nombre qui pourrait grimper à 26 millions selon la Croix-Rouge.
Dans les îles de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, encore difficiles d'accès, les dégâts matériels sont impressionnants : toitures arrachées, inondations, villes et paysages dévastés. Irma est tout simplement l'ouragan le plus puissant jamais enregistré dans l'Atlantique. Il a d’ores et déjà fait 5 morts sur l'île de Saint-Martin, 3 à Porto Rico. Un bilan encore provisoire et qui pourrait s'alourdir.