Pour le moment, l'administration Trump s'abstient d'asphyxier la capacité du Venezuela à exporter et vendre son pétrole. En revanche Citgo, la filiale américaine de la compagnie nationale vénézuélienne de pétrole se voit désormais frappée d'interdiction de payer des dividendes à l'État vénézuélien, rapporte notre correspondant à Washington, Pierre-Yves Dugua.
Ces nouvelles sanctions empêchent les fonds et banques américaines d'acheter ou de vendre de nouvelles obligations que le régime de Caracas pourrait émettre. Le Trésor américain précise que des opérations commerciales ainsi qu’humanitaires pourront toujours être financées normalement.
Pour les États-Unis, l'objectif est « d'empêcher le régime illégitime de Nicolas Maduro de trouver du crédit, mais aussi de bloquer la complicité du système financier américain dans le financement d'un régime corrompu qui appauvrit le peuple vénézuélien ». Le secrétaire au Trésor, Steve Mnuchin a souligné que les sanctions visaient le régime et que des dérogations avaient été prévues pour que les Vénézuéliens ne soient pas affectés.
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Dans les faits, la grande majorité des titres déjà émis par l'État vénézuélien vont continuer de s'échanger. On estime ce montant à quelque 67 milliards de dollars, dont les trois quarts sont dans les mains d'investisseurs étrangers.
« Guerre économique »
« Peut-être que les Etats-Unis essayent de créer ou de promouvoir une crise humanitaire dans notre pays », a immédiatement dénoncé Jorge Arreaza, ministre vénézuélien des Affaires étrangères, en marge d’une rencontre avec le secrétaire général des Nations unies, ce vendredi à New York. Selon lui, l’objectif de cette mesure n’est rien d’autre que « d'affamer le peuple vénézuélien ».
Delcy Rodriguez, la présidente de l’Assemblée constituante vénézuélienne a quant à elle dénoncé une « guerre économique ». Le président Maduro a pour sa part accusé la coalition de partis d'opposition de s’être transformé en un lobby politique pour demander aux Etats-Unis ces sanctions contre le Venezuela, rapporte notre correspondante à Caracas, Andreina Flores.
Le chef de l'Etat veut maintenant traduire en justice les dirigeants d'opposition, notamment le président de l'Assemblée nationale, Julio Borges. « J'ai demandé au président de la Cour suprème de justice et à la présidente de l'Assemblée constituante d’ouvrir un procès judiciaire historique, pour trahison à la patrie, contre tous ceux qui ont demandé ces sanctions, qui affectent notre vie économique, notre modèle social. »
Le président Maduro a nommé également une « commission de réponse aux sanctions » dont la première décision sera d’inviter les investisseurs américains à Caracas pour discuter des contrats déjà signés avec le gouvernement vénézuélien, et leur proposer de nouvelles affaires.
« L'option militaire » finalement exclue dans l'immédiat
Les Etats-Unis réclament des élections libres, la libération des prisonniers politiques et la fin de la répression, rappelle notre correspondant à Washington, Jean-Louis Pourtet. Si Maduro refuse, une intervention militaire américaine est-elle envisageable ? La Maison-Blanche assure exclure cette option pour le moment. Le 11 août dernier, le président américain avait en effet déclenché la polémique en évoquant à la surprise générale la possibilité d’une intervention militaire.
« Nous étudions toujours un vaste éventail d'options. Toute décision serait prise en conjonction avec nos partenaires dans la région et aucune action militaire n'est prévue dans un futur proche », a précisé ce vendredi 25 août le général McMaster, conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump.
Une dette astronomique
Ces nouvelles sanctions interviennent alors que la dette vénézuélienne est estimée à plus de 100 milliards de dollars. « C’est une des dettes les plus élevées du monde, rappelle Leonardo Vivas, professeur à l'université de Boston. Et l'endettement de PDVSA (la compagnie pétrolière nationale) est également très élevé. Ces sanctions réduisent à zéro la possibilité de contracter de nouvelles dettes sur le marché américain. »
L’économiste vénézuélien estime que cela va pousser le gouvernement à se tourner vers d'autres marchés. « Mais ceux-là sont eux aussi très inquiets de la situation et augmenteront donc le coût pour tout nouvel endettement. Cela aura pour conséquence de rendre la situation financière du Venezuela et celle de PDVSA plus que problématique. »
Leonardo Vivas souligne que la la prochaine échéance pour le remboursement d'une partie de la dette est prévue pour le mois d'octobre. Or « si le Venezuela ne peut pas rembourser la dette, il devra ouvrir ses capitaux afin de pouvoir payer. Et ces capitaux seront probablement achetés par des compagnies à qui PDVSA doit de l'argent. Cela mettra la compagnie pétrolière nationale à genoux. La situation sera alors catastrophique, pas seulement pour PDVSA mais aussi pour le gouvernement ».
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