Etats-Unis: bataille de procédure autour du décret anti-immigration de D. Trump

Le décret anti-immigration de Donald Trump est toujours bloqué. Le département américain de la Justice a formellement fait appel, samedi, de la décision du juge fédéral de Seattle qui avait suspendu l'application du décret présidentiel interdisant aux ressortissants de sept pays à majorité musulmane l'accès au territoire américain. Mais cet appel reste non suspensif, a décidé la justice ce dimanche.

Le département américain de la Justice a bien fait appel samedi soir de la décision du juge Robart, en demandant un rétablissement immédiat du décret migratoire. Ses arguments : la Constitution donne au président le pouvoir d’interdire ces entrées sur le territoire, et, en ordonnant cette suspension du décret, le juge Robart remet en cause des décisions présidentielles portant sur la sécurité nationale.

Mais la cour d’appel de Los Angeles a rejeté cette requête ce dimanche, et a donné jusqu’à lundi après-midi au département de la Justice pour lui apporter de nouveaux documents. La cour a également donné aux Etats de Washington et du Minnesota jusqu’à ce soir pour lui fournir des documents appuyant leur plainte – car c’est pour que cette plainte puisse être examinée que le juge Robart a suspendu vendredi le décret migratoire sur tout le territoire. Rappelons que le juge Ropart du tribunal de Seattle, agissait à la demande du ministère de la Justice de son Etat, l'Etat de Washington, qui met en doute la constitutionnalité du décret, qui cible une religion en particulier, la religion musulmane, explique notre correspondant à Washington, Jean-Louis Pourtet.

Après l'injonction temporaire du juge Ropart bloquant le décret migratoire, le département d'Etat a dû restaurer les quelque 60 000 visas qu'il avait révoqués, et celui de la Sécurité intérieure a annoncé un retour aux procédures habituelles aux contrôles aux frontières. De même les compagnies aériennes ont recommencé hier à embarquer des passagers des sept pays visés par le décret présidentiel.

Les images des retrouvailles familiales dans les aéroports américains ont fait le tour du monde alors que des manifestations d'opposants au décret ont eu lieu dans plusieurs capitales étrangères comme Paris, Berlin ou encore Londres. Aux Etats-Unis même, 53 % des Américains sont hostiles à ce décret selon un sondage.

La colère du président américain

« Bad people are very happy ! », « les méchants sont très contents », a réagi le président américain à ce nouveau revers. Donald Trump qui multiplie les tweets en forme de contre-attaque.

Donald Trump est maintenant engagé dans un bras de fer avec la branche judiciaire du gouvernement. Il affirme protéger les Américains contre les terroristes, mais le fait-il au prix d'une entorse à la Constitution ? Les opinions des juges pourront différer et le cas pourrait bien finir devant la Cour suprême. 

Le président américain face à la séparation des pouvoirs et au rôle du judiciaire

Pour la juriste Anne Deysine, professeure émérite à l'université Paris-Nanterre, auteure du livre La Cour suprême des États-Unis : droit, politique et démocratie, d'autres cours locales vont rendre des décisions. Mais au final, il reviendra bien à la plus haute juridiction du pays de statuer sur le fond. Or, le président vient d'y envoyer un neuvième juge, susceptible de faire pencher la balance du côté des conservateurs si le Sénat, doté d'une minorité de blocage démocrate, ratifie sa nomination.

Mais « si on considère que l’affaire arrive devant la Cour suprême dans quatre ou cinq mois, que le juge Gorsuch a effectivement été approuvé par le Sénat, il n’est pas du tout évident qu’il y aura une majorité de cinq conservateurs pour donner un feu vert au président. Parce qu’il y a une règle de base aux Etats-Unis, c’est que les juges sont très attachés à la puissance du pouvoir judiciaire (...) et que personne n’est au-dessus de la loi », explique la juriste.

 

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