De La Havane, Rodrigo Londoño, le grand chef des FARC, a ordonné le 29 août à toutes les unités de la guérilla et à chacun des combattants « de définitivement cesser le feu et les hostilités contre l'Etat colombien ». Les deux parties négociatrices se sont entendues sur « un accord final, intégral et définitif » qui doit être soumis à référendum le 2 octobre prochain avant d'entrer en vigueur.
« La paix parfaite n'existe pas parce qu'elle implique une justice parfaite et une justice parfaite rend la paix impossible, a déclaré à ce sujet le chef de l'Etat colombien dans un entretien à l'AFP. C'est une paix imparfaite, mais il vaut toujours mieux une paix imparfaite qu'une guerre parfaite. »
Pas de « plan B »
« Bien sûr, j'aimerais voir derrière les barreaux tous ceux qui ont commis des crimes atroces, des crimes contre l'humanité, poursuit Juan Manuel Santos. Mais je préfère une justice transitionnelle afin que nous ne fassions plus de victimes. Pour beaucoup, cette transition n'est pas facile à accepter, mais elle est nécessaire si nous voulons la paix. »
« Le "non" ne va pas gagner, a-t-il encore assuré. C'est le "oui" qui va l'emporter. J'en suis convaincu, et je n’ai pas de "plan B". J’en suis absolument convaincu, sinon je ne prendrais pas un tel risque car je n'y suis pas obligé. »
L'accord de paix conclu avec les FARC le 24 août après d'âpres négociations délocalisées à La Havane depuis novembre 2012, doit être signé le 26 septembre par le chef de l'Etat et par le leader suprême de la guérilla, Rodrigo Londoño, plus connu sous ses noms de guerre Timoleon Jiménez ou Timochenko. Il mettra fin à 52 ans d'un conflit armé meurtrier avec la plus importante guérilla de Colombie.
Plus ancien conflit du continent
Au fil des décennies, ce conflit, le plus ancien du continent, a impliqué plusieurs guérillas d'extrême gauche, dont l'Armée de libération nationale (ELN, encore active), des milices paramilitaires d'extrême droite et l'armée, faisant au moins 260 000 morts, 45 000 disparus et 6,9 millions de déplacés.
« J’aurais pu négocier sans le référendum, conclut Juan Manuel Santos. Mais le référendum est quelque chose de démocratique, qui légitime davantage un accord de cette nature. C’est la raison pour laquelle j’ai beaucoup insisté pour ce référendum. »
(Avec AFP)
■ L’opposition se mobilise contre l’accord de paix du président Santos
Dans une directive présidentielle parue lundi, le chef de l’Etat colombien Juan Manuel Santos autorise les fonctionnaires à participer à la campagne, et à utiliser les ressources publiques pour « promouvoir activement le vote pour le "oui " ou pour le "non" » dans le référendum. Le tout sans « perturber l’activité du service public », précise la directive.
Mais un passage du texte a suscité l’ire de l’opposition : « Les fonctionnaires pourront se prononcer publiquement en faveur de la paix à tous moments et sans aucune restriction » puisque selon la présidence, « les limitations de l’usage des ressources publiques ne s’appliquent pas en ce qui concerne la promulgation de la paix, en tant que valeur suprême de la société ».
Le procureur général de la Nation, Alejandro Ordóñez Maldonado, a annoncé ce mardi 6 septembre en conférence de presse qu’il déposait un recours contre cette directive auprès du Conseil d’Etat, estimant qu’elle sert à imposer « par tous les moyens légaux et illégaux la décision du gouvernement ».
Outre ce possible vice de forme, l’accord de paix a aussi été vivement critiqué sur le fond par l’opposition. Longuement interviewé ce mardi sur la radio W, l’ex-président colombien Alvaro Uribe s’est prononcé en faveur du « non » au référendum. Il a expliqué que l’accord en l’état n’était pas acceptable.
« Dans les 297 pages, il n’y a pas un mot de pardon des FARC. […] Nulle part il n’est question de rendre l’argent » pour dédommager les familles des victimes et l’Etat colombien. « Aux Colombiens qui vont voter "oui", je dis que ceux qui veulent voter "non" souhaitent aussi la paix », a-t-il ajouté. Une paix qui mérite d’être renégociée, selon l’ancien président Uribe.