C'est une indemnisation record pour une catastrophe exceptionnelle. Et le montant de la compensation fixé à 6,1 milliards de dollars pourrait encore augmenter.
Sur cette somme, 1,1 milliards seront provisionnés d'ici 2018 par l’entreprise Samarco, propriétaire du barrage avec le Brésilien Vale et l’Anglo-australien BHP Biliton. Les deux actionnaires de Samarco étant parmi les plus grands producteurs de minerais de fer au monde. La moitié de la somme provisionnée devrait être disponible dès cette année. Cet argent servira à réaliser en dix ans des programmes d'investissements destinés à la population et à l'environnement.
Négligence coupable
L'entreprise Samarco, suspectée de négligence coupable dans cet accident, s'est engagée à effectuer « une réparation complète, sans limites financières, jusqu'à la récupération totale », a insisté la présidente brésilienne, Dilma Rousseff. « Nous voulons construire une nouvelle vie sur les décombres d’une tragédie sans précédent », a-t-elle ajouté. L’accord prévoit, par exemple, de créer une réserve sur les 40 000 hectares dévastés dans le bassin du fleuve Rio Doce, avec notamment la réintroduction d’animaux sauvages.
Une coulée de boue toxique
Le 5 novembre 2015, la rupture de deux des trois barrages de rétention situés dans l’Etat du Minas Gerais a libéré une gigantesque coulée de boue chargée de déchets de minerais de fer qui a emporté sur son passage le village de Bento Rodrigues et contaminé l’embouchure de l'immense fleuve Rio Doce. Selon le Haut Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU qui avait dépêché ses rapporteurs sur les lieux de la catastrophe, la boue contenait « un niveau élevé de métaux lourds toxiques, ainsi que d’autres produits chimiques également toxiques ». Malgré ces déclarations, l’entreprise Samarco a maintennu sa version des faits, assurant que la boue « ne présentait aucun danger pour la santé, et ne contenait pas de substances contaminantes pour l’eau, même en cas d’exposition à la pluie ».
Depuis, les scientifiques considèrent le Rio Doce comme « mort ». Le littoral de Regencia, touché par la catastrophe, est un sanctuaire pour une espèce de tortues en voie de disparition. La réhabilitation du bassin du fleuve Rio Doce, pollué par la boue, prendra trente ans au moins, selon le ministère brésilien de l’Environnement.
Qui est responsable ?
Quelles étaient les causes de cette catastrophe ? Quatre mois après les faits, l’enquête est toujours en cours. Peu après l’accident, Samarco a développé une thèse selon laquelle la double rupture des barrages aurait été provoqué par un séisme. Des scientifiques ont effectivement confirmé qu’il y avait eu quatre légers séismes ce jour-là.
Mais les véritables causes semblent être ailleurs. Des risques existent sur les barrages de rétention. Surtout quand il s’agit d’accumulation excessive d’eau. Et le risque augmente avec l’âge des installations. La mine de Samarco est en exploitation depuis 1977. Or, selon Marcio Zonta, du mouvement réunissant des personnes affectées par l’industrie minière (Movimento dos Atingidos pela Mineração, MAM), la législation qui régit l’industrie minière ne prévient pas ce type d’accident. Dans une interview donnée au journal indépendant Brasil de Fato, Zonta pointe les mécanismes défectueux de contrôle et un manque d’audit externe. « Ce n’est pas un accident ! », martèle-t-il.
Dix-sept personnes sont mortes, deux sont disparues, 280 000 autres privées d'eau, des milliers d'animaux tués, des zones entières de forêt tropicale dévastées… Tel est le tragique bilan de cette catastrophe écologique. L’une des pires de l’histoire du Brésil.