Venezuela: après sa victoire, quelles priorités pour la MUD?

Lundi, le Conseil national électoral (CNE) a annoncé que la coalition de l'opposition vénézuélienne, la Table de l'unité démocratique (MUD), avait obtenu la majorité qualifiée des trois cinquièmes lors des élections législatives du 6 décembre. Deux jours après ce scrutin qui a fait basculer l’Assemblée nationale, de nombreuses questions se posent, dont celle de savoir quelle attitude va adopter la coalition de l’opposition.

La MUD a remporté 110 des 167 sièges que compte le Parlement unicaméral vénézuélien, a indiqué le CNE. Le Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV) du président Nicolas Maduro, fondé par le défunt chef de l'Etat Hugo Chavez, obtient 55 sièges, selon le CNE. Deux sièges restent à pourvoir.

Ainsi, rapporte notre envoyée spéciale à Caracas, Véronique Gaymard, la coalition de l’opposition a la majorité qualifiée à l’Assemblée. Un scénario qui, pour le camp chaviste, est lourd de conséquences. Au quartier général de la MUD, lors d’une conférence de presse, un représentant a égrainé les noms de tous les députés qui ont été élus. A Caracas ou encore dans l’Etat de Barinas, fief de l’ancien président Hugo Chavez, c’est ainsi l’opposition qui l’a emporté.

Première priorité pour la MUD : libérer les prisonniers politiques dont le chef du parti Voluntad Popular, Leopoldo Lopez, qui purge une peine de 14 ans de prison depuis les manifestations de l’an dernier (lire encadré). Ensuite, il s’agit de proposer un changement pour soulager les pénuries récurrentes, l’inflation et l’insécurité, mais pour l’instant, aucune stratégie n’a encore été présentée.

Le parti au pouvoir assommé

Le parti au pouvoir est encore assommé par sa lourde défaite, mais il met cette déroute sur le compte de ce qu’il appelle la « guerre économique », menée selon lui par la droite pour provoquer des pénuries dans le pays et entraîner un mécontentement dans la population.

« Le projet révolutionnaire bolivarien doit se poursuivre », confiait au micro de RFI un député du PSUV qui a perdu son siège ce dimanche à Caracas au profit d’un candidat de l’opposition. La population, elle, attend un véritable changement mais ne mise pas aveuglément sur la coalition de l’opposition pour redresser la situation économique du pays. Elle reste méfiante et attend des résultats concrets : la fin des longues files d’attente pour acheter des produits de première nécessité, la fin de l’insécurité dans un pays qui compte un des taux d’homicides les plus élevés du monde, et la fin de la polarisation et de la haine politique que se vouent les deux camps.

Une nouvelle Assemblée dès le 5 janvier prochain

Avec 110 députés, l'opposition aura les coudées franches, analyse notre correspondant à Caracas, Julien Gonzales. La MUD disposera même de pouvoirs élargis puisque la motion de censure contre des ministres est une des dispositions rendues possibles par la majorité qualifiée.

Si la MUD remporte, en plus des 110 sièges qu'elle a déjà conquis, les deux sièges qui restent à pourvoir, elle obtiendra alors la majorité qualifiée des deux tiers, fixée à 112.
Il faut dire que le seuil de 112 députés, la « super majorité », pourrait être capital pour l'opposition. Un tel résultat lui permettrait notamment de lancer un référendum révocatoire contre le président Maduro l'année prochaine, pouvant impliquer sa destitution suivant les résultats.

Mais le risque d'engager d'emblée une crise institutionnelle pourrait être gros pour l'opposition. Les Vénézuéliens semblent surtout l'attendre sur le terrain économique pour régler les problèmes de leur quotidien. La coalition d'opposition pourrait donc avoir tout intérêt à multiplier les propositions pour forcer le président à négocier avec elle.


 ■ Les prisionniers politiques, sujet prioritaire de l'opposition

La MUD déclare qu’elle entend légiférer dès le 5 janvier. L’une des premières mesures concernera donc les prisonniers politiques, dont le chef du parti Voluntad Popular Leopoldo Lopez, en prison depuis février 2014. Sa femme, Lilian Tintori, lance un appel pour la libération immédiate de tous les prisonniers politiques.

 

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