Avec notre correspondante à Washington, Anne-Marie Capomaccio
John Brennan reconnaît que la CIA a utilisé des méthodes « répugnantes ». L’exercice était compliqué. L'air extrêmement grave et tendu pour cette occasion exceptionnelle, le patron de la CIA a dû défendre ses hommes, reconnaître les erreurs, préserver ou plutôt reconstruire l’image de l’agence… Il a commencé par rappeler les attentats du 11-Septembre et le travail des agents de la CIA qui ont continué à opérer, aux États-Unis et sur le terrain, pour répondre à ces attaques.
C'est sur cette mise en perspective émotionnelle que John Brennan a bâti sa réponse au rapport du Sénat sur la torture, rendu public mercredi 10 décembre. Très tendu, la voix blanche au début de son intervention, il a condamné les « interrogatoires musclés ». Des actes, a-t-il, « qui ne doivent jamais se reproduire ». En substance, le directeur de l'Agence soutient sans nuance la position du président Obama. Les pratiques de la CIA ont franchi des limites inacceptables. L’équipe Bush n’est pas épargnée, des ordres ont été donnés, explique John Brennan, défendant le travail de son agence et de ses hommes, qui ne doivent pas être assimilés aux quelques-uns qui sont sortis du cadre.
« La CIA n’était pas préparée à conduire un programme d’interrogatoire et de détention. […] Il est toutefois essentiel de reconnaître que la très grande majorité des officiers impliqués dans ce programme à la CIA se sont acquittés de leurs responsabilités fidèlement, et en accord avec les règles de droit et les consignes qui leur avaient été données. Ils ont fait ce qu’on leur avait demandé de faire au service de notre nation ! »
Quant aux informations éventuellement obtenues sous la torture, le directeur de la CIA est revenu sur ses précédentes déclarations : « Le programme de détention et d’interrogatoire a produit des informations utiles. Mais nous ne sommes pas arrivés à la conclusion que c’est cette méthode qui nous a permis d’obtenir ces informations de la part des détenus soumis au programme. La relation de cause à effet entre les méthodes utilisées et les informations utiles ainsi obtenues ne sera, de mon point de vue, jamais connue. »
Le mot « torture » n’a jamais été employé par John Brennan. Ces méthodes ont effectivement permis d’obtenir des « informations utiles » mais, dit-il, « nous ne saurons jamais si ces elles ont mené à la cache de ben Laden ».