De notre correspondant à Sao Paulo,
Des documents confidentiels et inédits, datant de la fin des années 70, viennent d'être rendus publics : ils prouvent de manière indiscutable l’existence du fameux Plan Condor. Ce réseau clandestin de collaboration entre les dictatures sud-américaines, dans la lutte contre les oppositions de gauche, dans les années 70 et 80.
Mais surtout, ces documents, révélés par la presse brésilienne, et c’est une première, prouvent le rôle déterminant de la dictature brésilienne. Des documents officiels, assortis de photos, de schémas, expliquent les méthodes brutales et expéditives, et démontrent comment le Brésil a par exemple aidé les militaires argentins dans leur lutte contre les guérillas de gauche, en surveillant, puis en arrêtant leurs membres de passage au Brésil. Des militants ensuite souvent torturés, avant de disparaître sans que jamais plus personne n’entende parler d’eux.
Bourreau de la dictature
Ces documents inédits ont été retrouvés dans la maison de Paulo Malhaes, ex-colonel de l'armée. Il a été retrouvé mort, après un cambriolage il y a quelques mois dans sa maison, alors qu'il venait d'avouer ses crimes comme bourreau sous la dictature, dans le cadre de l’enquête de la commission Vérité. Les documents étaient cachés dans sa maison de la banlieue de Rio où l’ancien militaire profitait de sa retraite.
Le colonel était en charge de l’opération Gringo, qui a duré plusieurs années, et dont on apprend aujourd’hui l’existence grâce à ces documents. À la fin des années 70, le Brésil était devenu la base arrière des militants de gauche argentins. Entre 100 et 200 d’entre eux au moins étaient sous surveillance. Et plusieurs ont disparu. Le meurtre de l’un des leaders argentins est même décrit dans le détail dans ces fameux rapports retrouvés tout récemment.
Rapport final de la commission Vérité
Reste la question des suites judiciaires. Le 10 décembre aura lieu la remise du rapport final de la commission Vérité sur les exactions commises pendant la dictature après deux ans de travaux. C'est un évènement très attendu. Le Brésil a connu le plus long régime militaire d'Amérique du Sud, avec officiellement 400 morts, et 1000 personnes torturées, mais les chiffres sont bien supérieurs. Ce sera certainement l’une des informations clefs apportée par ce rapport.
Cependant, une loi d'amnistie, votée en 1979, sous la dictature, est toujours en vigueur, qui protège les criminels du régime de toute condamnation. La presse brésilienne estime que les membres de la commission Vérité pourraient justement remettre en cause cette loi d’amnistie. Mais manifestement le gouvernement hésite encore, car les forces armées brésiliennes refusent farouchement que l’on touche à cette loi d’amnistie.