La situation est loin d'être inédite aux Etats-Unis. Il y a quelques années, les présidents Ronald Reagan, Bush père et fils, ou encore Clinton, avaient déjà dû composer avec un Congrès qui n’était pas de leur bord.
Et aujourd’hui, les sujets de désaccord ne manquent pas. Le sort réservé au projet de réforme sur l'immigration que veulent faire passer les démocrates sera suivi de près par l’opinion. Pour le moment, les discussions sur ce projet démocrate sont gelées, mais ce texte qui prévoit la régularisation de sans-papiers présents depuis longtemps sur le territoire pourrait vite donner lieu à un bras de fer entre les conservateurs et les démocrates.
Blocage ou dialogue ?
Ce qui est acquis, c’est que, désormais en majorité, les républicains vont pouvoir imposer leurs débats au Congrès. Ainsi on les verra certainement lancer les discussions qui leur tiennent à cœur : celles sur la réforme fiscale, la construction de l'oléoduc Keystone XL, la réforme sur l'immigration voire la révision d’« Obamacare ». Néanmoins, les républicains qui n'ont remporté « que » 52 sièges sur 100 au Sénat n’ont pas la possibilité amender complètement cette réforme phare du président démocrate, car ils ne détiennent pas le seuil des 60 % des sièges nécessaires.
De plus, le président américain Barack Obama dispose d'outils pour empêcher le détricotage de l'Obamacare. C’est le cas notamment du droit de veto. Les proches du camp démocrate l'ont brandi à destination d'une opposition qui chercherait à limiter la portée de cette assurance-maladie à bas coût qui bénéficie déjà à 10 millions d'Américains.
Barack Obama a aussi évoqué l’utilisation des décrets présidentiels (« executive orders ») pour légiférer. Mais s’il devait procéder ainsi, cela voudrait dire que le président accepte le risque de passer pour la personnalité autoritaire dépeinte par les républicains pendant la campagne. La question est de savoir si l'on va assister à un blocage systématique ou bien si le dialogue et le compromis vont s'imposer.
Les observateurs ont noté avec intérêt le ton conciliant adopté par le sénateur républicain du Kentucky Mitch McConnell, nouveau chef des républicains au Sénat. L’homme a parlé de son désir de « travailler » avec le président Obama et ne pas entrer dans le « conflit perpétuel » avec les démocrates au Congrès. Quelques jours auparavant, il tenait un discours nettement plus dur envers le président Obama.
Diviser pour mieux régner
Le politologue Dick Howard, invité de RFI, y voit les divisions qui traversent le camp républicain et que pourrait exploiter Barack Obama : « Il va opérer selon le vieil adage "diviser pour régner". Donc il va chercher les failles dans la coalition républicaine et cette coalition justement est divisée entre son aile droite, la droite de la droite comme on dit en France, et le centre droit. Il va avoir le choix entre : j’isole la droite de la droite et pactise avec le centre droit ou je pactise avec le centre droit et la droite de la droite va se montrer intransigeante et ainsi je démontre au peuple que si celui-ci veut être bien gouverné il aura malheureusement à attendre 2016 et il y aura un successeur démocrate et ce sera une garantie pour mon héritage. »
Le spécialiste souligne que le camp républicain est très conscient de ses divisions et qu’il tâchera de ne peut pas laisser son aile conservatrice prendre le dessus et multiplier les obstructions, au risque d'apparaître comme le camp qui bloque. Déjà, l'année dernière, le public américain avait fait les frais de cette campagne de blocage puisque les administrations avaient été mises à l'arrêt lorsque les républicains s'étaient opposés au vote du budget.
L’attitude des républicains sera scrutée à propos des dossiers brûlants de l'immigration, du nucléaire iranien ou encore celui des nominations des juges de la Cour suprême. Entre bras de fer sanglant et recherche du compromis, les prochaines semaines diront quelle tendance l'emportera.