Avec notre correspondant à New York, Karim Lebhour
L’opposition syrienne repartira de New York avec de nouvelles promesses de soutien et quelques gros chèques. Les Etats-Unis s’engagent à verser 50 millions de dollars de plus pour des véhicules et des équipements. Ce n'est pas tout : cette fois, le Congrès a aussi autorisé la livraison d'armes et la mise en oeuvre de formations militaires. Reza Ashar, conseiller de la coalition syrienne pour l’organisation Independent Diplomat voit dans le tournant que constitue notamment les frappes aériennes, une chance pour l’opposition de s’affirmer sur le terrain.
« Ces frappes vont affaiblir l’Etat islamique, leur faire perdre des territoires que l’opposition modérée va pouvoir reprendre. Si l'EI est affaiblie, cela va permettre aux forces qui sont occupées à le combattre de se libérer pour se battre contre régime Assad... »
Car le véritable objectif de l’oppostion reste de renverser le régime de Bachar al-Assad. Et sur ce point, rien n’indique que les frappes de la coalition s’étendront aux forces d’Assad.
L'ambiguité d'Ankara
Cependant, l'un des principaux blocages pour l'éradication des groupes terroristes restent le « laisser faire» de la Turquie vis-à-vis des groupuscules, affirme le délégué permanent de la Syrie auprès des Nations unies, Bachar al-Jaafari : « Nous avons toujours dit que nous étions prêts à assumer notre rôle dans une coalition régionale ou internationale. Nous voudrions mettre un terme à ces terroristes en Syrie et en Irak, mais on ne peut pas faire cela tant que le gouvernement turc laisse faire les groupuscules terroristes, reçoit des milliers de terroristes venant de l’Amérique, du Canada, de l’Australie, de la France, de l’Angleterre, de la Belgique. Tant que le gouvernement d’Erdogan laisse faire, laisse ces terroristes passer à travers nos frontières avec la Turquie, on ne peut pas combattre le terrorisme d’une façon crédible. »
■ Vu de Turquie: une éventuelle participation militaire divise
Avec notre envoyé spécial à Yumurtalik, Jérôme Bastion
Dans le camp de Yumurtalik, non loin de la frontière syrienne, tout le monde a entendu parler des frappes de la coalition contre les positions de l’Etat islamique, qui sont vues comme une bonne chose pour ces réfugiés kurdes. Quant à l’éventualité que la Turquie y participe, les avis sont très partagés.
Mamoueya, 64 ans, se veut optimiste : « D’après ce que l’on peut comprendre, la Turquie va rentrer dans la danse, oui. Et ce serait une bonne chose, car Daech est équipé d’armes lourdes, et si la coalition nous fournit des armes ou continue ses bombardements, ça changera le rapport des forces et ça nous aidera à nous en débarrasser. »
Mahmoud, 19 ans, est d’une opinion radicalement opposée : « Impossible, car c’est bien Erdogan et le gouvernement turc qui poussent les islamistes à aller faire la guerre aux Kurdes de Syrie. Quand les Américains ont bombardé Raqqa, ça a tellement déplu aux Turcs qu’ils ont appelé à redoubler les attaques contre le Kurdistan. »
Quand à Adla, 52 ans : « Je ne sais pas si la Turquie joindra la coalition ou pas, et si ça servira à quoi que ce soit, mais je me demande d’où vient cette haine contre les Kurdes, cette méchanceté contre les Kurdes. »
Quoi qu'il en soit, ces frappes font craindre, à court terme, qu’elles ne fassent redoubler l’ardeur des troupes islamistes.