De notre correspondant à Rio de Janeiro,
Depuis une semaine, les rues et les plages de Rio de Janeiro sont couvertes d’ordures. Le bras de fer entre la mairie et les éboueurs aura été très dur. Les « Gari », c’est ainsi que l’on appelle les éboueurs ici à Rio, ont commencé leur grève samedi dernier, en plein carnaval, un choix stratégique pour ces éboueurs, dont les uniformes orange ont déserté les trottoirs de la ville. Conséquences immédiates : des rues nauséabondes jonchées d’ordures, de sacs plastiques éventrés, le tout chauffé par une température de près de 30°.
Une grève considérée comme illégale
Les éboueurs demandaient une revalorisation de leur salaire, de 250 euros mensuels à l’heure actuelle, à 360 euros. Le maire de Rio a tenté dans un premier temps d’étouffer le mouvement, en déclarant la grève illégale, ce qui a rapidement durci la protestation. Pendant huit jours, la ville de Rio de Janeiro a donc vu ses poubelles s’accumuler sur ses trottoirs, alors que plus de 800 000 touristes étaient là pour fêter le carnaval.
Et les éboueurs ont tenu bon. En milieu de semaine, la célèbre plage d’Ipanema s’était transformé en décharge à ciel ouvert. Dans la banlieue nord de la ville de véritables montagnes d’ordures s’amoncelaient aux pieds des favelas. Le maire a dû faire appel à des sociétés privées pour le nettoyage des rues, et il a même fait escorter les éboueurs non grévistes par des policiers armés. Pendant ce temps, les protestataires ont multiplié les manifestations en profitant bien sûr de l’écho médiatique, amplifié par le carnaval.
Menacés d’amendes, de licenciement, vilipendés par le maire et leur propre syndicat, les éboueurs pourtant n’ont pas flanché. Ils ont finalement obtenu gain de cause. Ce week-end, le maire de Rio s’est incliné, leurs salaires seront augmentés. Il faudra tout de même encore trois ou quatre jours pour nettoyer Rio de ses ordures accumulés.
Climat social tendu au Brésil
Ce mouvement social en annonce peut-être d'autres au moment de la Coupe du monde. Peu avant le carnaval, très médiatisé ici au Brésil, ce sont les policiers fédéraux qui s’étaient mis en grève. Ces derniers mois, de grandes corporations, comme les professeurs, les dockers, les routiers, se sont mis en grève. Il semble qu’un nombre grandissant de professions, de celles qui triment pour des salaires trop bas, ne veulent plus se laisser faire. Et comme les éboueurs pour faire connaître leur cause, ils utilisent une caisse de résonnance médiatique, comme le carnaval.
Alors qu’en sera-t-il pour la Coupe du monde ? Les mouvements sociaux contestataires, ceux qui étaient descendus dans la rue en juin dernier, annoncent déjà leur intention de profiter du Mondial de football pour faire entendre leur voix dans le monde entier. Le climat social au Brésil se crispe, et pourrait bien exploser en juin prochain, lors de la Coupe du monde de football.
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Dans le même temps, une vidéo montrant Eduardo Paes, le maire de Rio de Janeiro, se débarrasser de déchets en les jetant par terre, a fait le tour des réseaux sociaux. Il a demandé à être sanctionné d'une amende et a présenté ses excuses.