Etats-Unis: la Une de Rolling Stone avec Djokhar Tsarnaev fait scandale

Aux Etats-Unis, la dernière couverture du magazine Rolling Stone, qui sort ce vendredi 19 juillet 2013, fait déjà polémique. On y voit un jeune homme au regard mélancolique, les mèches brunes lui tombant sur les yeux, la bouche cernée d'un bouc, sauf que ce n'est pas le chanteur d'un groupe de musique, mais Djokhar Tsarnaev, accusé d'avoir planifié et perpétré les attentats lors du marathon de Boston le 15 avril 2013. De quoi susciter une vague d’indignation notamment sur le net.

De notre correspondant à Washington,

La couverture du numéro d’août de Rolling Stone qui sort ce vendredi a effectivement provoqué une vague de réactions tant dans la presse que dans la blogosphère : 100 000 tweets en 24 heures, et 80 000 « J’aime » sur Facebook. D’une façon générale, les réactions sont majoritairement défavorables. Le gouverneur du Massachusetts, qui avec le maire de Boston a condamné le choix du magazine, a résumé le sentiment général quand il a parlé d’une faute de goût.

Dans un tweet, le rédacteur en chef adjoint, écrit pour la défense de Rolling Stone que « Sur la couverture, nous l’appelons un monstre. C’est provocateur de le montrer comme un jeune Américain comme les autres, mais c’est précisément l’objet de l’article ». Et effectivement, dans l’article, il n’y a rien de particulièrement choquant. L’auteur explique comment Djokhar, venu de sa Tchétchénie natale avec sa famille aux Etats-Unis, et qui avait réussi à s’adapter sans difficulté apparente à la vie américaine, est progressivement devenu un jihadiste. L’article se base sur une enquête minutieuse et sans la couverture, il n’aurait probablement pas provoqué la moindre controverse.

Ceux qui critiquent la décision de la rédaction de Rolling Stone avancent le non-respect des victimes comme dans ces messages publiés sur les réseaux sociaux : « Rolling Stone, vous devriez avoir honte. Vous auriez dû mettre l’une des victimes des attentats sur votre couverture au lieu de ce salaud ». « Pour le cas où vous ne vous en seriez pas rendu compte, Djokhar est un meurtrier et pas une star de rock et n’a pas sa place sur la couverture de Rolling Stone ». « Après avoir été un lecteur de Rolling Stone pendant 22 ans, je viens d’annuler mon abonnement. Glorifier un terroriste est bien loin de Springsteen et Nirvana », écrit encore un autre internaute.

De son côté John Rich, musicien déclare : « En tant qu’artiste j’ai toujours pensé que si je faisais la couverture de Rolling Stone, j’aurais réussi. Mais depuis que le magazine fait la promotion de terroristes, je ne le pense plus ».

Un fan-club pour Djokhar Tsarnaev

Il y a tout de même des commentaires moins sévères. En fait, Djokhar Tsarnaev a depuis son arrestation ses groupies. Le site Free Djokhar réuni en majorité des femmes qui sont fascinées par sa personnalité. L’une d’elles s’est même fait tatouer sur le bras la phrase qu’il avait écrite sur la note retrouvée sur le bateau où il s’était caché et dans laquelle il disait : « Si vous avez le savoir et l’inspiration, la seule chose qu’il vous reste à faire, c’est de passer à l’acte ». Une psychologue parle d’une « sympathie maternelle mal placée ».

Pour en revenir à la couverture de Rolling Stone, certains soulignent que la même photo avait été publiée à la Une du New York Times en avril. D’autres soulignent le sérieux de l’article lui-même. Vitriolique, un internaute note que d’autres hebdos ont bien publié la photo de George Bush et Dick Cheney qu’il appelle, « des criminels de guerre ». Sur le ton humoristique, quelqu’un écrit aussi « Depuis quand de nos jours, les jeunes lisent-ils ? ».

En tous cas, cette couverture discutable n’est pas sans conséquence financière pour le magazine. Plusieurs chaînes de magasins ont décidé de ne pas vendre le numéro d’août, comme CVS, Walgreen, Seven Eleven, et une demi-douzaine d’autres. Et une nommée Jennifer dans un commentaire invite une quinzaine de grosses sociétés telles qu’Apple ou McDonald à retirer leurs annonces. Pas mal de blogueurs d’ailleurs pensent que si Rolling Stone a choisi une couverture provocatrice, c’est dans l’espoir de faire remonter ses ventes. Si tel est le cas, l’objectif sera vraisemblablement atteint, car il est probable que bien des gens qui n’achètent pas normalement le magazine seront tentés aujourd’hui de le faire, par simple curiosité.

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