Twitter ouvre un siège au Brésil pour pallier sa perte d’audience

Fort de sa pénétration au Brésil, considéré comme l’un de ses cinq marchés les plus importants en nombre d’utilisateurs, Twitter a annoncé, début décembre 2012, l’ouverture d’un bureau brésilien à São Paulo, le poumon économique du pays. Une tentative de stopper la perte d’influence du réseau au Brésil, où Facebook demeure le roi.

Pour contrer une chute faramineuse de 24% d’utilisateurs en l’espace d’un an, selon des chiffres rendus publics par comScore au mois de septembre, Twitter vient de s’installer au Brésil pour éviter la fuite des internautes brésiliens, qui se tournent plutôt vers Facebook. Ainsi, le réseau de Mark Zuckerberg poursuit sa progression et a connu une augmentation de 64% dans le pays, selon la même étude. La stratégie de Twitter commence aussi par un renforcement de partenariat avec les annonceurs et les agences de communication, selon les propos de son vice-président, Shailesh Rao, rapportés par le quotidien brésilien Folha de S. Paulo. Le bureau ouvert à São Paulo est le troisième en dehors des États-Unis – Twitter possède aussi des antennes au Japon et au Royaume-Uni.

Twitter prêt à tout pour ne pas devenir un deuxième Orkut

Selon M. Rao, le « modèle économique » proposé par Twitter est en pleine croissance, et le Brésil reste encore un marché « avec un fort potentiel » à développer. « Si l’audience était mauvaise on n’ouvrirait pas une filiale ici », a t-il ironisé lors d’une conférence de presse, rappelant que les résultats diffusés par comScore ne prennent pas en compte l’audience sur les mobiles. Quoi qu’il en soit, Twitter est prêt à tout faire pour ne pas devenir un deuxième Orkut, le réseau lancé par Google en 2004 qui a été devancé récemment par Facebook dans le pays. D’autant plus que le Brésil est à lui seul le deuxième pays dans le monde en nombre d’utilisateurs sur Twitter, selon une étude de l’entreprise Semiocast.

Pour reconquérir les Brésiliens, Twitter a aussi annoncé avoir intégré neuf villes brésiliennes aux « Trending Topics » : São Luís et Recife dans le Nord-Est du pays, Belém située dans le nord, Goiânia à côté de Brasília la capitale, Belo Horizonte dans le sud-est, Curitiba et Porto Alegre dans le sud, Guarulhos et Campinas dans l’Etat de São Paulo. Le réseau envisage aussi d’associer des marques dans les messages et dans les Timelines des twittos.

Depuis 2011, Twitter a cédé la place à Facebook

Twitter a explosé au Brésil en 2008, et s’est rapidement popularisé dans ce pays connu pour le profil plutôt avant-gardiste de ses internautes. Devenu une véritable fièvre pendant quatre années, depuis 2011, il a cédé la place à Facebook, Instagram, Tumbrl ou Pinterest, considérés plus interactifs. Beaucoup de célébrités locales et d'usagers de la première heure ont donc arrêté de publier des messages sur le réseau. Il serait actuellement plutôt fréquenté par des adolescents et par la classe C, cette partie de la population qui est devenue récemment consommatrice avec le développement économique du pays, considérée « moins branchée ».

« Twitter n’a pas un algorithme intelligent »

« La question est que Twitter n’a pas un algorithme intelligent » explique Marcus Cardoso, directeur de la planification stratégique digital pour l’agence Ogilvy Brésil. « Quand j’avais le temps de suivre les messages, tout allait bien. Mais si on ne suit pas la Timeline tout le temps, après on est perdu... Facebook nous donne au moins le choix de voir les publications intéressantes de la journée », a-t-il expliqué à RFI. « Sur Twitter, je ne participe plus, je diffuse simplement s’il y a quelque chose à diffuser, et ensuite je ferme la page. »

Le Brésilien : un « ami » plutôt qu’un « disciple »

D’autres chiffres donnent aussi des pistes sur les raisons qui mènent les Brésiliens à délaisser Twitter. Une étude rendue publique en février par l’entreprise Semiocast montre que 40% des comptes brésiliens ne possèdent que 5 abonnés ! De plus, 25% des twittos brésiliens n’ont pas publié de message cette année. Des spécialistes avancent aussi d’autres hypothèses pour essayer de comprendre cette fuite : parmi elles, l’impossibilité de contrôler son audience, ses abonnés, et la diffusion des contenus (photos, textes, liens). Il s’agirait aussi d’une question culturelle : le Brésilien préférerait être « ami », plutôt que « disciple », pouvoir discuter ouvertement avec ses interlocuteurs plutôt que d’avoir accès à leur expertise, s’amuser sur les réseaux plutôt que s’informer. Bref, déconnecter aussi sans complexe. « Sans avoir l’impression d’avoir raté quelque chose » résume M. Cardoso.

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