La visite relevait de la simple routine ; elle est aujourd’hui qualifiée de fiasco politique. Cette semaine, une délégation de six parlementaires égyptiens a été reçue à Washington pour rencontrer plusieurs officiels de l'administration Obama et le personnel du Wilson Center, un think tank spécialisé dans les questions de politiques étrangères. Pour les Américains, cette visite était l'occasion de rencontrer des membres du nouveau Parlement égyptien et de discuter avec eux des futures relations entre leurs deux pays.
Hani Nour el-Dine était l’un des élus invités. Il n’aurait pourtant jamais dû être accepté sur le territoire américain. Car selon la loi américaine, tout membre d’un groupe terroriste figurant sur la liste établie par Washington est interdit de territoire aux Etats-Unis et peut être expulsé s’il est découvert par les autorités. Or l’homme politique égyptien est membre de Gamaa al-Islamiya, une organisation salafiste placée sur la liste noire des Etats-Unis pour sa participation à plusieurs attentats. Elle est notamment liée à celui qui a coûté la vie au président égyptien Anouar el-Sadate en 1981. C’est elle aussi qui a revendiqué le massacre de Louxor en 1997 qui a tué 62 personnes.
Son chef spirituel, le cheikh Omar Abdel Rahman, surnommé « le cheikh aveugle », a été condamné à la prison à vie en 1995 pour son implication dans un attentat contre le World Trade Center à New York en 1993. Il est connu pour avoir été un allié proche d’Oussama ben Laden et d’al-Qaïda. La nébuleuse terroriste a d’ailleurs réclamé à plusieurs reprises sa libération. Selon le site d'information Daily Beast, Hani Nour el-Dine a profité de son passage à Washington pour demander à Denis McDonough, le conseiller adjoint à la Sécurité nationale, le transfèrement du cheikh dans une prison égyptienne. En vain.
Cafouillage
Alors comment Hani Nour el-Dine a-t-il pu recevoir un visa ? Une enquête cherche aujourd’hui à le déterminer. « Nous nous penchons sur les circonstances de ce cas particulier », a déclaré Victoria Nuland, porte-parole du département d’Etat. « Quiconque obtient un visa passe à travers toute une série de vérifications. Cependant, ces vérifications dépendent de l’honnêteté des informations qui sont à notre disposition au moment où on l’examine », a-t-elle ajouté.
Pour les spécialistes des questions de sécurité intérieure, ces vérifications auraient pourtant pu être simples. « Personne ne l’a googlé ? », s’interroge ainsi Eli Lake, journaliste au Daily Beast. Dans son article daté du 21 juin, il cite Samuel Tadros, chercheur à l’Institut Hudson à Washington : « Cela aurait pris cinq secondes au département d’Etat pour taper son nom en arabe dans Google et réaliser qu’il est membre d’une organisation terroriste ».
Si Hani Nour el-Dine ne cache pas son appartenance à Gamaa al-Islamiya – il l’affiche même sur son profil Facebook – il se défend d’être lui-même terroriste. « Je n'ai été personnellement impliqué dans aucune action violente ou de terrorisme contre les Etats-Unis ou tout autre pays », a-t-il affirmé au magazine Newsweek.
A quelques mois de l’élection présidentielle américaine, voilà en tout cas une affaire qui risque de porter ombrage au gouvernement de Barack Obama.