Douglas McKeon, l’homme qui va juger DSK dans le Bronx

Dans son bureau de la Cour suprême du Bronx avec vue sur le célèbre stade de baseball des Yankees, le juge Douglas McKeon prépare ce qui sera peut-être l’affaire la plus retentissante de sa carrière. « C’est la première fois qu’un de mes dossiers intéresse davantage en Europe qu’à New York », sourit ce magistrat d’origine irlandaise, né dans le Bronx, amateur de bretelles à l’ancienne et d’affiches de combats de boxe. Il présidera, mercredi 28 mars 2012, la première audience dans le cadre de la plainte civile déposée par Nafissatou Diallo contre Dominique Strauss-Kahn, le 8 août 2011 pour « agression violente et sadique ». La femme de chambre guinéenne entend obtenir des dommages et intérêts d’un montant encore inconnu.

De notre correspondant à New York

« Ce sera une audience technique, prévient le juge. M.Strauss-Kahn a déposé une requête concernant son immunité diplomatique. Je vais écouter les arguments des deux parties sur ce point et je rendrai ma décision dans deux ou trois semaines ». Si Douglas McKeon donne raison à l’ancien directeur du Fonds monétaire international, la procédure s’arrête. Dans le cas contraire, l’affaire promet d’être longue : « Environ une année pour la constitution du dossier, puis encore une année pour un éventuel procès », précise-t-il. Un délai raisonnable au regard de l’encombrement du tribunal du Bronx dans l’un des districts les plus défavorisés de New York. Le cas Diallo vs Strauss-Kahn est l’un des 25 000 dossiers en cours de traitement.

Dans son prétoire, le juge McKeon voit surtout défiler des poursuites pour erreurs médicales, des parents qui demandent réparation pour une malformation non repérée pendant la grossesse, et les plaintes contre l’administration carcérale des prisonniers de Rikers Island, la prison, toute proche, où Dominique Strauss-Kahn a séjourné. Tous ces dossiers ne vont pas au procès. « Dans 90% des cas, les poursuites se terminent par un accord à l’amiable, estime le magistrat. Heureusement d’ailleurs ! Nous n’avons pas les moyens d’organiser un si grand nombre de procès ». Douglas McKeon a construit sa réputation sur son habileté à éviter de longues et coûteuses procédures. « J’essaye toujours d’encourager les parties à trouver un accord, mais ce n’est pas toujours possible. Parfois, un procès est nécessaire ».

Si le procès va à son terme, le jury devra décider non pas de la culpabilité, un terme réservé au pénal, mais de la responsabilité de Dominique Strauss-Kahn et du préjudice subi par Nafissatou Diallo. Le montant des dommages et intérêts accordés lors des procès civils aux Etats-Unis peut se chiffrer en millions de dollars. D’autant que les jurés du Bronx ont la réputation d’être particulièrement généreux. « C’est vrai qu’il y a eu des verdicts généreux dans le Bronx, reconnaît Douglas McKeon. Mais cette réputation est exagérée. C’était peut-être vrai, il y a vingt ans, plus aujourd’hui », s’anime-t-il, citant une idée reçue, véhiculée par le roman de Tom Wolfe Le Bûcher des Vanités, en 1987. L’histoire ? Un riche financier de Wall Street est accusé d’avoir renversé et tué un jeune Noir dans le Bronx et voit sa vie s’effondrer.

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