Argentine : la crise dix ans après

Entre sourire retrouvé et fin de mois difficile, l’Argentine vient de passer un cap : 10 ans se sont écoulés depuis la crise économique de 2001. Faillites en cascade des entreprises, des banques et même de l’Etat argentin, alors incapable de payer ses dettes ou les salaires de ses fonctionnaires. Aujourd’hui le cauchemar est loin. Mais la pauvreté est toujours endémique, et l’inflation galopante.

Il y a dix jours, Cristina Kirchner était très largement réélue présidente de l’Argentine, avec près de 54% des voix. Un véritable raz de marée électoral pour la présidente sortante, qui a profité de l’embellie économique de l’Argentine pour assurer sa réélection. A coups d’aides financières de l’Etat, et d’une politique interventionniste, l’Argentine a réussi revenir dans la course. Avec notamment un taux de croissance qui frôle désormais les 8%. Nestor Kirchner a été élu en 2003, puis sa femme Cristina lui a succédé : le couple a donc en quelque sorte accompagné l’Argentine depuis sa sortie de crise.

La carotte et le bâton

Assez habilement, Nestor puis Cristina Kirchner ont su jouer des atouts de leur pays, en profitant notamment du contexte mondial de hausse du prix des matières premières. Cristina Kirchner n’a par exemple pas hésité à se mettre à dos les agriculteurs argentins, en voulant leur imposer une augmentation des taxes sur les exportations de soja et de tournesol. Une mesure qu’elle n’a pas réussi à mettre en place. Et la fermeté qu’elle a montré à l’égard des syndicats agricoles, à l’époque, a fait chuter sa cote de popularité sous les 20%.

Mais en augmentant les salaires réels, ainsi que les retraites et les prestations sociales la présidente a su flatter son électorat populaire. Un jeu de carotte et de bâton, qui a donné la victoire à Cristina Kirchner, en s’imposant lors de l’élection présidentielle avec près de 37 points d’avance sur son plus proche rival. Mais bien des économistes dans le pays se demandent combien de temps encore l’Argentine pourra maintenir son système de subventions.

 

Ventres vides

Presque la moitié de la population bénéficie d’une aide sociale, au détriment des investissements dans l’éducation, la santé et les infrastructures publiques. D’autant que l’inflation, qui s’élève à près de 20% même si le gouvernement ne le reconnaît pas, grignote les subventions versées à la population.

Les petits salaires ne suffisent plus face au coût de la vie qui augmente de jour en jour. La situation de bien des Argentins est encore critique. Dans les quartiers pauvres de la banlieue de Buenos Aires des centaines de cantines populaires proposent des repas gratuits à des familles qui n’ont pas assez d’argent pour nourrir leurs enfants. Chaque jour, des dizaines de milliers de personnes sont contraintes de mettre leur assiette sous le bras pour aller manger ce qu’on leur offre. La reprise argentine est donc lente, et n’atteint pas encore tout le monde, loin de là.  

Certains en profitent plus que d’autres. Les berges du port fluvial de Buenos Aires en témoignent. Les docks délabrés ont été complètement rénovés et investis par des restaurants très chics et très chers.

Quand certains n’ont rien à manger, sur les terrasses de Puerto Madero un steak argentin peut se payer plus de 25 euros, quand le salaire minimum est de 400 euros. L'inflation des prix touche donc les aliments de base comme les autres catégories de prix, creusant le fossé entre riches et pauvres, entre ceux qui ont les moyens de faire face à l'inflation et les autres.

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