Même si le spectre d’un défaut de paiement de la Grèce s’est éloigné avec la mise en place par l’Union européenne et le Fonds monétaire international d’un plan de sauvetage de 110 milliards d’euros, l’effondrement de l’économie argentine en 2001 reste présent dans tous les esprits. La situation de la Grèce aujourd’hui présente en effet, à bien des égards, des similitudes avec celle de l’Argentine il y a une dizaine d’années avec un fort endettement et surtout l’impossibilité pour ces deux pays d’éviter la faillite en dévaluant leur monnaie.
La dette grecque a ainsi atteint 300 milliards d'euros, soit 113% de son Produit intérieur brut, tandis que le défaut de paiement de l’Argentine portait sur 90 milliards, le plus important de l’histoire à ce jour. Athènes a également renoncé à son indépendance monétaire en rejoignant l'euro, comme Buenos Aires l'avait fait en accrochant le peso au dollar.
Mais là s’arrête la comparaison entre les deux pays, car si la Grèce reste plus que jamais arrimée à la monnaie unique, l’Argentine – soumise à une forte pression sociale en raison des mesures d’austérité imposées par le Fonds monétaire international – a été contrainte de tourner le dos au billet vert pour pouvoir dévaluer sa monnaie. Il faut ajouter à cela que l’Argentine était un pays isolé sur la scène internationale et sa banqueroute ne présentait pas de risque systémique. Ce n’est pas le cas de la Grèce, membre à part entière de la zone euro, et dont la faillite aurait pu s’étendre à d’autres pays du sud de l’Europe. C’est d’ailleurs le risque de contagion à des Etats comme l’Espagne, le Portugal ou l’Irlande, qui a conduit au plan de sauvetage sans précédent dont bénéficie aujourd’hui Athènes.
Des recettes qui ont échoué en Argentine
Mais ce qui inquiète aujourd’hui les observateurs, ce sont les contreparties réclamées à la population grecque. Le Fonds monétaire international impose en effet à la Grèce les mêmes vieilles recettes d'austérité qui n'ont pas empêché l'Argentine de couler en 2001. Les 110 milliards d’euros, dont va bénéficier le pays, ne garantissent qu’une chose : que pendant trois ans la Grèce paiera sa dette. Car en baissant les salaires et en augmentant les taxes, la compétitivité du pays sera soumise à très rude épreuve.
En Argentine, ce type de mesures avait été suivi en 2001 par la faillite du pays. La présidente argentine Cristina Kirchner a elle-même comparé la crise économique en Grèce à la débâcle vécue par son pays à cette époque. Elle a notamment fait le parallèle entre les manifestations de ces derniers jours à Athènes et la grave crise sociale qui a secoué l’Argentine dans les années 2000. « Ces images y ressemblent trop et sont le fruit des mêmes recettes des organismes internationaux de crédit, avec suppression d'administrations municipales, réduction de salaires et ajustement » a-t-elle déploré.
Ecoutez l’interview de Carlos Quenan. Maître de conférences à l’Institut des hautes études de l’Amérique latine, il est également économiste chez Natixis