L’avertissement résonne comme un coup de tonnerre. En plaçant « sous surveillance » la note attribuée à la dette américaine, l’agence de notation Moody’s est la première à illustrer l’inquiétude des marchés financiers sur les négociations entamées sur le relèvement du plafond de la dette. L’agence argue qu’il existe « une possibilité croissante » que les deux parties n’arrivent à s’entendre avant le 2 août prochain. Ce jour-là, selon le Trésor américain, si aucun accord n’est trouvé, les Etats-Unis seraient en cessation de paiement. La première puissance économique mondiale ne pourrait, alors, plus honorer toutes ses dépenses.
Véritable bras de fer
C’est pour cette raison que Barack Obama a entamé, il y a maintenant près de deux mois, des négociations avec les républicains, majoritaire à la Chambre des représentants. Seul point d’accord : les conservateurs veulent bien relever le plafond de la dette. Au détail près qu’ils veulent imposer leurs conditions. Les républicains estiment que « l’État doit tout simplement réduire ses dépenses ». Les responsables du parti conservateur réclament une réduction budgétaire de 2 400 milliards de dollars. Pour eux, il n’y a pas de choix, quitte à faire des coupes dans les dépenses sociales.
De leurs côté, les démocrates ne partagent pas cet avis. Une réduction d’un peu plus de 1 000 milliards de dollars est suffisante. Mais pour atteindre cet objectif, les Etats-Unis ne peuvent se priver d’une une hausse d’impôts, les démocrates en sont persuadés. Barack Obama le répétait encore il y a quelques jours : « Je voudrais plus de revenus et moins de coupes dans les programmes dont profitent les familles de la classe moyenne ». Ce à quoi John Boehner, le président (républicain) de la Chambre des représentants répond : « Les Américains savent que les hausses d'impôts détruisent les emplois, et la dernière chose que nous devrions faire maintenant, avec un chômage à 9,2%, serait de lancer de nouvelles mesure gouvernementales qui détruiraient des emplois ».
Malgré des réunions quotidiennes depuis une semaine, aucun accord n’a été conclu. Les deux parties ne veulent pas lâcher leur position même si lundi 11 juillet, à la question : « Est-ce qu’un accord est possible dans les 10 jours ? », le président américain répondait : « Il le faut ! ».
Des pressions de plus en plus fortes
Mais la pression pourrait ne plus être soutenable pour les deux camps. En plus de l’avertissement, pour le moment sans frais, de Moody’s, la Fed (la Réserve fédérale des Etats-Unis) s’alarme aussi. Le président de la Banque centrale américaine, Ben Barnanke, a averti qu’un défaut de paiement créerait des « problèmes énormes » pour le pays et une « crise majeure » à l’échelle mondiale. On comprend mieux l’énervement de Barack Obama, lors des discussions, mercredi 13 juillet. Selon Eric Cantor, le numéro deux du groupe républicain à la Chambre des représentants, le président aurait lancé « Ça suffit » aux représentants républicains. Il aurait même claqué la porte avançant que « cela avait assez duré, que Ronald Reagan (ancien président républicain) ni aucun autre président ne sera resté assis aussi longtemps ».
L’élection de l’an prochain dans le viseur
La bataille qui s'est engagée entre les deux camps montre, si certains en doutaient encore, que la campagne présidentielle de 2012 a débuté. Barack Obama doit à tout prix faire aboutir ces négociations. Le président américain joue sa crédibilité pour l'élection de l'an prochain. Les républicains le savent bien et font tout pour contrarier le président.
Une réduction trop importante des dépenses serait une pilule difficile à avaler pour le candidat Obama. En 2008, le démocrate avait été élu sur un programme social avec, par exemple, la promesse de la réforme de la santé. Cette mesure avait été âprement discutée dans les deux chambres avant d’être finalement votée, en 2010, au grand dam des (plus) conservateurs. Certains candidats à la primaire du Parti républicain, comme la représentante du Tea Party Michele Bachmann, ont d'ores et déjà annoncé vouloir supprimer cette coûteuse réforme s’ils étaient élu à la présidence.
La dette sera donc, à n’en pas douter, au centre de l’élection de l’an prochain. Mais les électeurs pourraient reprocher aux républicains leur entêtement si aucun accord n'est mis en place avant la date ultime du 2 août prochain.