Des valises spéciales permettant de rétablir l’internet quand il est coupé dans tout un pays, c’est l’une des technologies que sont en train de développer le département d’Etat américain et le Pentagone pour contrecarrer la censure dans les dictatures. Le « printemps arabe » l’a démontré : les réseaux sociaux jouent désormais un rôle primordial dans l’organisation des mouvements de contestation contre les régimes autoritaires à travers le monde.
Technologie de contournement
C’est tellement vrai qu’en Iran, en Syrie et en Libye, les gouvernements en place ont suspendu plusieurs fois l’accès de la population à internet ces derniers mois afin d’empêcher la dissidence de s’informer et de communiquer. Les Etats-Unis travaillaient déjà sur une technologie de contournement depuis un moment mais ils ont redoublé d’efforts lorsqu’ils ont vu qu’Hosni Moubarak, confronté à une vague de contestation en Egypte, coupait l’accès à internet et à la téléphonie mobile dans son pays en janvier dernier, avant d’être renversé.
Selon le New York Times, Washington a rapidement débloqué deux millions de dollars pour accélérer la mise au point d’une « valise internet », projet confié à une équipe de quatre jeunes génies de la programmation informatique, mais aussi du piratage. Cette valise rendrait possible la création d’un réseau internet sans fil grâce à un maillage de téléphones mobiles ou d’ordinateurs personnels, sans avoir recours à un point de connexion central.
Facile à transporter, à mettre en service, et à dissimuler, elle serait équipée de petites antennes wifi pour étendre la zone couverte, d’un ordinateur portable pour gérer le système, de clefs USB et de CD pour installer le logiciel sur d’autres appareils et coder les communications. « Nous allons mettre sur pied une infrastructure distincte qu’il sera quasiment impossible de désactiver, de contrôler ou de surveiller », a déclaré au quotidien new yorkais Sascha Meinrath, le responsable du programme. Ce projet de valise internet est loin d’être le seul à mobiliser l’administration américaine dans ce domaine de la technologie du contournement.
Tous les moyens sont bons
Les Etats-Unis auraient ainsi dépensé des sommes folles pour créer un réseau de téléphonie mobile en Afghanistan. Ils développeraient également des logiciels préservant l’anonymat des utilisateurs pour des pays comme la Chine où les communications sont contrôlées. Les Américains encouragent aussi les initiatives locales comme, par exemple, le partage de fichiers à l’aide du système Bluetooth en Iran, pays qui songe à se déconnecter complètement de l’internet mondial ou l’introduction clandestine en Corée du Nord de téléphones portables destinés aux dissidents.
« De plus en plus de gens à travers le monde utilisent internet, les téléphones mobiles et d’autres technologies pour faire entendre leurs voix, protester contre l’injustice et chercher à réaliser leurs aspirations », a justifié la chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, dans un courriel adressé au New York Times. « Ces projets peuvent se retourner contre les Etats-Unis grâce aux experts en technologie informatique des pays musulmans », a été prompt à répliquer Ramin Mehamanparat, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères.