Barack Obama, le ton grave, l'air concentré, a reconnu et assumé sa défaite politique. Mais sur les raisons de ce revers, il s'est contenté de dire que les Américains étaient frustrés de la lenteur de la reprise économique. Les Américains, a-t-il dit, « veulent que l'emploi revienne plus vite, ils veulent plus de pouvoir d'achat, ils veulent enfin que leurs enfants aient les mêmes possibilités que celles qu'ils ont eues ». Le président affirme aussi avoir « stabilisé l'économie, créé des emplois dans le secteur privé. Mais les Américains ne ressentent pas les effets de ces progrès », a-t-il reconnu. Un petit mea culpa, alors que le chômage dans le pays frôle les 10 % de la population active. Selon un sondage sortie des urnes, six électeurs sur dix indiquaient qu'ils avaient voté avec la situation économique en tête.
Sur les modalités de la cohabitation forcée avec les républicains, Barack Obama a lancé un appel au respect mutuel, à l'unité de toutes les forces politiques - la vraie bataille, a-t-il dit, n'est pas entre républicains et démocrates, mais entre les Etats-Unis et leurs compétiteurs dans le monde. Il envisage une coexistence ouverte mais ferme avec les républicains : les bonnes idées, d'où qu'elles viennent, sont bonnes à prendre, a expliqué Barack Obama. Par exemple, sur la réforme du système de santé, des modifications sont possibles... Sous-entendu, pas question d'abroger le texte voté dans la première partie de mon mandat, seulement de l'améliorer. Ces déclarations présidentielles survenaient alors que le nouvel homme fort des républicains à la Chambre des représentants, John Boehner, venait de dire qu'il fallait supprimer ce texte.
Cette cohabitation « Made in America » sera donc un combat feutré et rude sur les principaux dossiers : le système de santé, mais aussi les réductions budgétaires réclamées par la nouvelle majorité. Le chef de l'Etat a été très clair : pas question de « tailler dans les investissements essentiels qui doivent nous assurer une économie compétitive et en croissance dans les années à venir ». Ces investissements sont pour lui les grandes infrastructures de transport - aéroports, chemins de fer, le développement de l'économie « verte », et l'éducation.
Des républicains déterminés mais divisés
Face à lui, les premières déclarations des républicains se voulaient fermes et déroulaient les grandes idées classiques du camp conservateur : moins d'interventionnisme de Washington dans les affaires du pays, une plus grande écoute du peuple, la réduction des dépenses publiques, et donc, l'abrogation de la réforme symbole du système de santé.
Le problème pour la nouvelle majorité, c'est qu'elle arrive certes en force à la Chambre des représentants, mais reste minoritaire au Sénat. Les républicains dénoncent le style et les idées d'Obama, mais eux-mêmes n'ont pas de programme fortement défini, à la différence par exemple de leur victoire aux élections mi-mandat de 1994, et encore moins de leader naturel.
De plus, ils sont divisés, entre leur aile centriste, et ce mouvement beaucoup plus radical du « Tea Party », qui a connu quelques succès éclatants, mais aussi des échecs retentissants lors de ce scrutin. Dans les deux ans à venir, ils devront choisir entre une stratégie de consensus ou d'opposition. Pour l'heure, leur stratégie est surtout négative, et Barack Obama pourra jouer là-dessus à l'approche des élections présidentielles de novembre 2012. Sur le thème : ce que j'ai fait, cela me revient, ce qui n'a pas été fait, c'est la faute des républicains. Ces derniers devront donc être dans la proposition pour ne pas être cantonnés au rôle de freins aux réformes. Une chose est sûre : dans chacun des deux camps, on réfléchit déjà au meilleur positionnement possible pour ce scrutin déterminant, dans deux ans.