Honduras : la repression silencieuse

Il y a un an, le 28 juin dernier, un coup d'Etat renversait le président constitutionnel, Manuel Zelaya. Depuis, Porfirio Lobo a été élu président, lors d'une élection contestée qui a battu des records d'abstention. Le Honduras a retrouvé un calme relatif dans un pays qui s'est refermé sur lui-même, et où les atteintes aux droits humains se sont multipliées dans l'indifférence générale de la communauté internationale.

Avec notre correspondant à Tegucigalpa, François-Xavier Freland

A Tegucigalpa, depuis un an, seuls les murs ont la parole. Face à une presse censurée, des mains anonymes dénoncent chaque jour les exactions du pouvoir actuel. En un an, neuf journalistes ont été retrouvés morts, la plupart appartenait à des médias de l'opposition. Les journalistes de la chaîne internationale vénézuelienne Telesur, proche du président Hugo Chavez ont eux-mêmes été molestés à plusieurs reprises, Regina Osorio, la correspondante de Telesur à Tegucigalpa témoigne :

« Aujourd'hui, on fait plus attention lorsqu'on sort de chez nous. On vérifie toujours si une voiture nous suit ou pas. On se méfie en fait de la police ou de l'armée. On prend des précautions pour éviter qu'on nous fasse du mal car nous ne pouvons pas avoir confiance en ces gens armés ».

Radio TV Globo est une institution au Honduras. Ses programmes ont été interrompus à nombreuses reprises, ses locaux dévastés lors d'une perquisition musclée, ses animateurs reçoivent régulièrement des menaces de mort. Très écoutée, c'est la seule chaîne d'opposition qui donne un peu d'écho à la voix de la résistance, David Elmer, animateur et directeur de Radio TV Globo explique :

« Nous à radio TV Globo, on ne s'occupe pas du football et du mondial. On a essayé justement de ne pas trop en faire sur ce thème pour ne pas nous éloigner de notre principale mission, qui est d'informer sur la situation. Pour que les Honduriens conservent un espace où on ne leur parle pas que de football, sinon de la réalité que vit chaque jour ce pays ».

Pour étouffer la vérité sur les exactions, la justice a été reprise en main. L'avocat Dixon Herrera s'occupait de dénoncer les cas de violation des droits de l'homme. Il a été définitivement radié de la profession.

« Depuis le 27 janvier dernier, c'est à dire depuis que le président Porfirio Lobo assume la pouvoir, le pays n'a jamais connu autant d'assassinats, dit-il. Aujourd'hui, la répression n'est pas aussi visible qu'avant. Autrefois, on voyait lors des manifestations, la répression de la police et de l'armée s'abattre sur les manifestants. Aujourd'hui, c'est une répression souterraine. En quelques mois, ils ont assassiné des journalistes, des dirigeants de la résistance, des syndicalistes, des avocats.

En fait, la répression est encore plus forte et plus violente. Mais ça la communauté internationale ne le voit pas. La communauté internationale vient ici et dit, ah oui le Honduras a l'air tranquille. Le Honduras est en paix. Ce qu'ils ne voient pas, c'est l'immense violence générée par le coup d'Etat ».

Une « commission pour la Vérité» a été crée lundi 28 juin, en marge de l'importante manifestation contre le coup d'Etat, afin de faire toute la lumière sur les crimes sélectifs commis dans la plus grande impunité depuis un an.

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