De notre correspondante à la Havane,
8 % de baisse du PIB cubain. C’est le scénario envisagé par la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPAL). Cuba fait face à un cruel manque de liquidités depuis bien avant la crise du coronavirus, avec les difficultés économiques de son principal allié, le Venezuela, et le renforcement du blocus américain. Le Covid-19 n’a donc fait qu’empirer la situation avec la fermeture des frontières au tourisme.
Pour capter des devises, dont le gouvernement a besoin pour importer - puisque la monnaie cubaine ne sert pas sur les marchés internationaux -, de nouveaux magasins de produits alimentaires et d’hygiène ouvrent leurs portes dès ce lundi. Des magasins où l’on ne peut payer qu’en devises et par carte bancaire.
Une dollarisation de l'économie qui ne profite pas à tout le monde
La taxe de 10 % sur le dollar, mise en place il y a plusieurs années pour répondre en quelque sorte au blocus américain, est tout simplement supprimée. Et cela malgré l’hostilité accrue ces derniers temps de l’administration américaine, précise le gouvernement. Une mesure qui devrait donc encore une fois inciter les Cubains à utiliser le billet vert, du moins pour ceux qui y ont accès.
Mais cette dollarisation de l’économie cubaine est perçue comme une injustice par la population. C'est que l’ouverture de ces magasins d’alimentation en dollar arrive dans un contexte d’importantes pénuries. Les Cubains sont empêtrés dans des files d’attente pour accéder à des produits de première nécessité depuis des mois, et très peu sont les chanceux qui pourront entrer dans ces nouveaux magasins avec une carte bancaire en devises.
Cependant, le président Miguel Diaz-Canel défend cette mesure. Il ne s’agit en rien d’un « apartheid économique », comme veulent le faire croire les ennemis de la révolution cubaine, a-t-il dit. Le ministre de l’Économie tente de rassurer : les magasins en monnaie cubaine seront conservés et toujours achalandés. Cette mesure n’a « rien de discriminatoire ». Il s’agit simplement de récupérer des devises pour financer les importations. Mais parmi la population, on voit déjà se dessiner une société à plusieurs vitesses.
Des mesures pour le secteur non étatique
À Cuba, on ne parle pas de secteur privé, mais de secteur non étatique ou encore des travailleurs à leur compte. Le gouvernement répond à l’une de leurs plus importantes revendications : l’accès à un marché de gros en devises. Ainsi que la possibilité d’importer et d’exporter.
Les activités autorisées dans le secteur privé seront également élargies. Les cuentapropistas, les travailleurs cubains indépendants, se réjouissent largement de ces annonces.
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