De notre correspondante à Montréal,
À la demande d’un parti d’opposition, un comité parlementaire vient de se former pour trouver des solutions afin de rétablir des ponts entre le Canada et la Chine. Pour l’instant, les députés des partis d’opposition et du parti Libéral au pouvoir veulent pouvoir examiner les relations avec la Chine sous tous les angles, sans se limiter à l’affaire de la demande d’extradition de Meng Wanzhou, la numéro deux de Huawei.
Dans la ligne de mire des parlementaires, il y a les difficiles conditions de détention de Michael Spavor et de Michael Kovrig. Le diplomate et l’homme d’affaires canadiens croupissent dans une cellule en Chine depuis l’arrestation de la femme d’affaires chinoise au Canada en décembre 2018.
►À lire aussi : Chine: après un an de détention, le sort des deux Canadiens toujours en suspens
Ils ont accès seulement une fois par mois à la visite d’un diplomate canadien, et vivent dans des conditions matérielles difficiles. Pour l’un des députés, membre du comité, une des familles a demandé aux parlementaires d’agir avec prudence dans ce dossier : ils ne veulent pas dégrader encore un peu leur emprisonnement déjà éprouvant.
L’un des anciens premiers ministres du Canada, Jean Chrétien, a d’ailleurs suggéré il y a quelques jours d’échanger les deux Michael canadiens, comme on les appelle, contre la liberté de Meng Wanzhou de Huawei. Cette proposition a été rejetée du revers de la main par la ministre des Affaires étrangères. Cette dernière a fait remarquer que ce genre de pratique n’a pas court dans un pays qui respecte les règles de droit.
Le Canada subit les foudres commerciales de la Chine
En attendant, en plus de subir l’emprisonnement de ses deux concitoyens accusés d’espionnage par la Chine, le Canada subit aussi les foudres commerciales de la puissance chinoise. On peut dire que 2019 représente une des pires années pour les exportations agricoles du Canada vers la Chine. Bon an mal an, ce pays importe non seulement beaucoup de soja et canola [le colza au Canada], mais il constitue aussi un énorme marché pour le porc et le bœuf canadien.
►À lire aussi : La Chine interdit la viande canadienne sur son territoire
Dans la foulée de la demande d’extradition de Meng Wanzhou, les agriculteurs canadiens ont vu les portes chinoises se fermer. Sauf que l’épidémie de peste porcine qui sévit dans l’Empire du milieu a favorisé une certaine reprise des importations. Le Canada a perdu des centaines de millions d’euros dans le secteur agricole. Les membres du comité parlementaire veulent donc s’attaquer également à ce problème. Pour élaborer une stratégie efficace, ils ont notamment demandé à entendre l’ambassadeur canadien en Chine début février.
L’un des premiers pays à reconnaître la République populaire
Le paradoxe est que le Canada entretient des rapports difficiles avec la Chine, alors que ce pays a été un des premiers à reconnaître la République populaire de Chine dans les années 50. C’est vrai que les relations entre la Chine et le Canada ont longtemps été au beau fixe. En 1970, Pierre-Elliot Trudeau, un des anciens premiers ministres du Canada et père de Justin Trudeau, a fait une visite remarquée dans ce pays. Il a établi des relations diplomatiques avec l'État chinois avant même d’ailleurs les États-Unis et beaucoup d'autres pays occidentaux.
Depuis quelques années, le Canada semble cependant avoir perdu ce rôle d’avant-garde. À vrai dire, sa politique étrangère se plie de plus en plus à celle en vigueur chez son voisin du Sud. Le comité parlementaire qui tiendra une de ses premières réunions demain lundi espère donc pouvoir réfléchir à une façon indépendante d’établir des relations entre les deux pays.