« On comprend qu'on est sur un ring, on voit le public autour, on voit le dos du lutteur qui est musclé, mais ce qui est le plus important, c'est vraiment cette main derrière. La main de l'aide-soignant qui vient et qui le soutient. Parce que pour moi, c'est ça le moraingy. C'est vraiment une idée de connexion dans la communauté. »
Corps massifs, poses aériennes, regards qui défient l'objectif. Christian Sanna offre aux visiteurs une plongée au cœur des combats informels de cet art martial ancestral.
Pendant trois ans, les dimanches après-midis, l'enfant du pays a arpenté les plages de sable fin et les parkings bétonnés de Nosy Be, Hasselblad argentique en main, pour capturer les errances et désirs de résilience de ses amis lutteurs.
« Beaucoup des jeunes de Nosy Be, quand Nosy Be a commencé vraiment à perdre toutes les économies locales, que ce soit le rhum ou la canne à sucre, ils se sont un peu retrouvés sans avoir de formation, et d'un coup le tourisme est arrivé, et beaucoup de ces jeunes-là se retrouvent sans avoir de place dans tout ça. Beaucoup de mes amis me disaient : "On n'arrive pas à trouver du travail, donc on ne peut pas construire une famille, nos parents ne nous voient pas comme des adultes." Et ils me disaient : "Au moins en faisant le moraingy, en m'entraînant, je retrouve des camarades, et puis quand je gagne, je deviens quelqu'un d'important. On me respecte." Donc il y a vraiment cette idée de reconstruction identitaire de ces jeunes garçons à travers un art martial traditionnel. Et moi c'est vraiment ce côté-là que j'ai voulu illustrer avec mes clichés. »
Des clichés puissants, envoûtants même, à découvrir jusqu'au 21 juillet à l'Institut français de Madagascar.