Elections au Kenya: l'UA, le Commonwealth et la société civile aux aguets

Quelque 20 millions d'électeurs kényans se rendent aux urnes ce mardi 8 août pour six scrutins simultanés : présidentielle, législatives, élections locales. 180 000 agents des forces de sécurité sont déployés dans un contexte tendu, dix ans après la sanglante crise post-électorale qui avait fait plus de 1 000 morts. Plusieurs milliers d'observateurs sont dans le pays pour surveiller le processus, notamment des représentants de l'Union africaine et du Commonwealth. Leurs chefs de délégations, les anciens présidents sud-africain Thabo Mbeki et ghanéen John Dramani Mahama ont lancé un appel au calme. De leur côté, les Kényans participent aussi activement à l’observation de leurs élections.

Alors que les mauvais souvenirs de 2007 sont encore dans les mémoires, les deux anciens présidents ont voulu lancer un message d'apaisement. Lundi encore l'opposition a critiqué le système électoral informatisé censé garantir l'équité du vote. Le Sud-Africain Thabo Mbeki a assuré garder confiance.

« Les risques de fraudes ont été soulevés. La commission nous a assuré de la fiabilité de l'infrastructure. Un test grandeur nature impliquant tous les acteurs a été conduit. Et le système a fonctionné. Nous n'avons aucune raison de penser qu'il ne marchera le jour J. »

L'ancien président Ghanéen, John Dramani Mahama a appelé les gens à la patience en cas de ratés du système. Il a également rappelé à quel point la réaction des leaders politiques allait être déterminante. « Tous les candidats ont une responsabilité pour reconnaître que la violence n'est pas une option, a-t-il affirmé. Un concurrent doit être courtois dans la victoire comme dans la défaite. On ne peut pas avoir deux présidents, deux gouverneurs ou deux sénateurs pour un même poste. 90% des candidats vont perdre. Leur comportement dans la défaite sera crucial. »

Le Ghanéen a appelé les Kényans à ne pas se laisser manipuler et entraîner dans la violence. En tout cas, si la situation se tend, Thabo Mbeki a insisté sur la disponibilité des observateurs. « Nous ne prenons pas l'avion après le vote. Donc même à titre individuel, s'il y a un quelconque besoin d'intervention, nous serons là », a-t-il déclaré. 

Il a également rappelé que des mécanismes existaient en cas de litige. Il a aussi rappelé que l'UA et le Commonwealth seraient informés de tout manquement aux règles démocratiques.


Reportage : La société civile se prépare

Ce ne sont pas moins de 7 000 observateurs locaux qui sont déployés depuis plusieurs semaines dans les 290 circonscriptions kényanes. Discours haineux, ouverture et fonctionnement des bureaux de vote, et surtout, décompte des voix, le groupe d’observation des élections ELOG, qui regroupe 10 ONG, ne laisse rien de côté. « Les observateurs sont d’abord là pour renforcer la confiance des votants dans le processus, explique Suzanne Mongera, du comité de direction. Certains se méfient des institutions, ou même du comportement des personnes présentes dans le bureau de vote… Et même si nous respectons et travaillons en collaboration avec les observateurs internationaux, les nôtres sont des observateurs du Kenya. »

Depuis près de 10 ans, les citoyens sont aussi appelés à signaler eux-mêmes les incidents dont ils pourraient être témoins via SMS, Twitter, et même par Facebook cette année. C’est grâce à la célèbre plateforme Ushahidi qui traitera toutes ces données depuis une salle de crise à Nairobi. « Notre équipe de volontaires traitera les informations au fur et à mesure de leur arrivée, affirme Declan Ottaro, directeur des programmes à Ushahidi. S’il y a par exemple des incidents qui requièrent l’intervention de la commission électorale, comme des bureaux de votes qui ouvrent en retard, ou des queues trop longues, cela sera signalé à la commission. S’il y a des problèmes de sécurité, cela sera envoyé à la police, et puis si besoin à la Croix-Rouge. »

En 2013, la plateforme avait reçu plus de 8 000 messages d’alerte. Cette année, grâce à de nouveaux outils, le nombre devrait encore augmenter.

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