Cela fait presque un an que toute manifestation est interdite en RDC avec des arrêtés, des circulaires ou de simples déclarations aussi parfois des autorités politico-administratives. Officiellement, pour éviter des troubles et des victimes comme ça a pu être le cas en septembre et décembre l'an dernier.
Sans surprise, depuis dimanche soir, la plupart des lieux de manifestation étaient en effet quadrillé par la police ou l'armée. Mouvements citoyens et société civile ont quand même tenté de braver l'interdit imposé par les autorités, car pour eux, cet interdit est inconstitutionnel. Selon l'un des mouvements citoyens organisateurs, les rassemblements ont été dispersés partout ou presque, dans une dizaine de villes du pays : Kinshasa, Goma, Beni, Butembo, Kasindi, Lubumbashi, Mbandaka et Bukavu. Dispersions souvent musclées, comme à Kisangani où les jeunes disent avoir été battus et menacés.
Tirs de gaz lacrymogène et tirs à balles réelles
Bilan provisoire des forces de sécurité : 17 interpellés à Kinshasa, 11 à Butembo et une quarantaine à Goma. Les organisateurs en ont dénombré plus de 128. Même si certains ont été libérés depuis. Ils seront tous libérés, « ordre du chef de la police », promet son porte-parole, le colonel Mwanamputu. Mais jusqu'au soir, plusieurs d'entre elles étaient encore détenues. A Lubumbashi, par exemple, maître Timothée Mbuya et quatre autres manifestants ont été conduits à la nuit tombée à la prison de Kasapa.
C'est sans doute à Bukavu que la situation a été la plus tendue. Avec des tirs de gaz lacrymogène et des tirs à balles réelles signalés dans la matinée autour du siège de la société civile, selon des témoins. Deux journalistes de Canal Futur ont été également interpellés et du matériel saisit, racontent des confrères. On compte au total une dizaine de blessés selon la société civile. La coordination du Sud-Kivu a d'ores et déjà annoncé une journée ville morte de protestation ce mercredi.
Pour la police, la faute est du côté des organisateurs
Au total au moins 13 journalistes ont été interpellés dans le pays. Un autre journaliste est toujours détenu à Kinshasa, d'autres avaient aussi été interpellés, avant d’être relâchés. A Goma également, la presse a été ciblée et le matériel confisqué. On signale notamment l’interpellation du correspondant de RFI en swahili, Daniel Chube Ngorombi, relâché deux heures plus tard. Première association professionnelle à protester, l'Association des médias en ligne qui condamne ces débordements. « Ils étaient dans la marche, on ne pouvait pas savoir qu'ils étaient journalistes », explique le colonel Mwanamputu. Les confrères - eux - assurent que les policiers, s'ils ne les arrêtaient pas, les forçaient à tout effacer dans leurs appareils photo et enregistreurs.
Pour la police, la faute est du côté des organisateurs de cette journée de protestation, qui ne se seraient pas coordonnés sur leurs itinéraires avec les autorités politico-administratives. C'est ce que dit le porte-parole de la police : « Ils étaient sur la chaussée sans que l'on sache où ils allaient », explique le colonel Mwanamputu. Pour les organisateurs de la manifestation, c'est un premier pas que d'avoir réussi à démontrer que la peur s'est désormais installée dans le camp du régime en place.