C'est une zone qui a connu de nombreux massacres depuis novembre 2015, malgré la présence de l'ONU, sur fond de rivalités entre groupes armés et communautés. Le Sud Libero, comme le territoire de Walikale d'ailleurs où des bases sont également fermés, était le fief des FDLR, les rebelles hutus rwandais.
Ce sont d'abord des groupes armés rivaux hostiles aux Hutus qui les avaient attaqués, comme le NDC-Rénové du chef de guerre Guidon, à Buleusa, fin novembre 2015. L'armée congolaise, les FARDC, avait ensuite également lancé une offensive contre les FDLR. Et enfin derniers acteurs, plusieurs milices d'autodéfense nandés avaient été créées, dont les Maï-Maï Mazembe, qui ne voulaient plus voir de Hutus au Sud Lubero. Il y avait donc une dimension ethnique derrière ces violences.
Finalement, attaqués de toute part, les FDLR ont fui, mais les groupes qui luttaient contre eux sont toujours là et de plus en plus régulièrement, ils s'affrontent pour le contrôle de telle ou telle localité. Pas plus tard que ces derniers jours, le NDC-Rénové de Guidon, qui est devenu l'un des groupes les plus importants du Nord-Kivu aujourd'hui, a fait son entrée dans Miriki, furieux de la présence de Maï-Maï Mazembe. Mardi soir, selon la société civile du Lubero, après négociation avec la population et les FARDC, il a fini par se retirer. Mais lui, comme les Maï-Maï Mazembe sont toujours là, dans les environs.
Risque de catastrophe humanitaire
C'est dans ce contexte qu'on annonce la fermeture de cette base de Luofu, car officiellement la situation sécuritaire s'est améliorée. Mais pour le député du Nord-Kivu, Ernest Kyaviro, c'est une catastrophe sécuritaire et humanitaire qui s'annonce. L'annonce du départ des Casques bleus à Luhanga, juste à côté de Luofu, avait provoqué le déplacement de milliers de déplacés hutus, ils étaient sous la menace d'une attaque des Maï-Maï Mazembe qui les avait massacrés quelques mois plus tôt.
Pour Ernest Kyaviro, il faut non seulement que la Monusco reste dans la zone, mais qu'elle cesse d'ignorer la présence de ces groupes considérés comme proches de l'armée congolaise. « Un supplétif qui devient l'ennemi de la population doit être éradiqué », martèle-t-il en référence à Guidon et son NDC-Rénové. Pour la société civile du Lubero, même chose, il est temps que l'armée congolaise et la Monusco s'attaquent à ses groupes qui « n'ont plus de raison d'être », puisque les FDLR ne sont plus là.
Du côté de l'armée congolaise, commede la Mission onusienne, on assure ne faire aucune distinction entre un groupe armé et un autre. La Mission onusienne précise qu'elle a encore des bases à Kanyabayonga et Kirumba à partir desquels elle pourra lancer des patrouilles. Mais c'est de cette neutralité que semble douter le député du Nord-Kivu. Pour lui, il y a beaucoup trop d'intérêts au Nord-Kivu. Qui arme ses groupes, qui les soutient et pourquoi ? Ce sont des questions, selon Ernest Kyaviro, auxquelles il est urgent de répondre avant de penser à fermer les bases de l'ONU.
→(Re)écouter l'invité Afrique soir: Nord-Kivu: fermeture de bases de la Monusco, le général Commins se veut rassurant