La cérémonie d’ouverture du dialogue national en RDC devrait débuter à 15 h, heure locale. Parmi les personnalités qui vont s’exprimer, outre le facilitateur Edem Kodjo : le commissaire à la Paix et à la Sécurité de l’Union africaine, Smaïl Chergui, et le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies, Maman Sidikou.
L’enjeu du rendez-vous : trouver une issue à la crise. D’une durée initiale de 15 jours, le dialogue national est censé amener à des élections crédibles et transparentes dans le respect de la Constitution - c’est ce que dit la feuille de route établie par le comité préparatoire. Le tout grâce à un accord politique et à des discussions techniques autour du processus électoral.
Il y a urgence, car la Commission électorale nationale indépendante (Céni) a déjà affirmé ne pas pouvoir tenir l’élection dans les délais prévus par la Constitution. En tout cas, pas avec la refonte du fichier électoral en cours. Mais le risque, c'est que le dialogue national manque de représentativité, et constitue une occasion manquée.
Les ténors de l'opposition boycottent le dialogue
Les principaux partis de l'opposition soupçonnent le gouvernement congolais, mais aussi la Céni et la majorité, de tout faire pour maintenir le président Kabila au-delà de son deuxième et dernier mandat, qui se termine en décembre 2016. De son côté, la majorité dénonce des discours incendiaires de l’opposition, qui menaceraient la démocratie.
Certains opposants ont cependant choisi de rejoindre le dialogue, et ont lancé un dernier appel à leurs frères avant le dialogue, les enjoignant à venir, disent-ils, barrer la route à Joseph Kabila de l’intérieur. Parmi ces participants : Vital Kamerhe de l’UNC, Jean-Lucien Bussa du CDER, et Samy Badibanga (opposition parlementaire). Tous ont été exclus des plateformes ou partis auxquels ils appartenaient.
Au final, quelque 200 délégués vont participer. Quatre composantes seront représentées : majorité, opposition, société civile et personnalités. Mercredi soir, à la veille du dialogue, toutes ces composantes disaient travailler encore sur la liste de leurs délégués. Aucun calendrier clair n'a été établi non plus au-delà de la cérémonie d’ouverture. « Il n’est pas dit que les 15 jours seront consécutifs », dit la facilitation.
Le Rassemblement dénonce un jeu de dupes
Côté opposition, le grand absent du dialogue, c'est le « Rassemblement ». Cette coalition de partis allant du MLC au G7, et emmenée par l'UDPS d'Etienne Tshisekedi, dénonce un jeu de dupes. La promesse de libérer tous les prisonniers politiques, chiffrée à plus d'une centaine de personnes, tout comme celle de rouvrir les médias proches de partis d'opposition, n'a pas été tenue par le pouvoir, juge l'opposition.
Résultat : sans climat de confiance, ni réel geste de « décrispation », pas de dialogue. C'est ce qu'explique Bruno Thsibala, porte-parole de l'UDPS, sur les antennes de RFI.
Le MLC, deuxième parti d'opposition au Parlement, rejette pour sa part depuis le début l'idée d'un dialogue politique avec le pouvoir. Le parti de Jean-Pierre Bemba voudrait qu'opposition et majorité se limitent à des concertations techniques sur le calendrier électoral, pour garantir au plus vite une alternance dans le pays - un horizon partagé par tous, y compris ceux qui ont choisi de participer.
Mercredi encore, des représentants de la communauté internationale - le chef de la force onusienne Monusco, l’ambassadeur de l’Union européenne - tentaient d’arracher au gouvernement de nouvelles mesures de décrispation, et au Rassemblement de l’opposition, sa participation au dialogue. Car la communauté internationale s’inquiète elle aussi de l’absence de représentativité.
La feuille de route alternative de la coalition
Le Rassemblement a déjà prévu de déposer ce jeudi sa propre feuille de route alternative à l'Union africaine. La coalition d'opposition demande la démission du facilitateur Edem Kodjo, jugé trop proche du pouvoir, car il a échoué à obtenir les prérequis souhaités par l'opposition. Le Rassemblement plaide pour une centaine de délégués seulement, majorité et opposition, avec leur société civile associée. Et de poser un paramètre non négociable : le départ de Joseph Kabila à la fin de son mandat.
Pour sa part, le représentant du pape François au Congo se dit fâché de la tournure qu'ont prise les événements, même s'il continue d'appeler toutes les parties à rejoindre le processus. Pour lui, les mesures de décrispation, même si elles constituent un geste, sont insuffisantes. Et sans les principaux partis d'opposition, le dialogue qui s'ouvre ce jeudi risque bel et bien de manquer de représentativité, et donc de crédibilité.