« Je suis extrêmement fière et extrêmement émue. Cela prouve que le reportage reste une discipline nécessaire et reconnue également puisque la série que j’ai proposée parle des migrants ouest-africains dont on parle assez peu finalement », explique Claire Meynial à RFI. Ces réfugiés-là ne fuient pas la guerre, mais la misère.
« J’étais très frappée parce que l’on parle toujours des réfugiés en évoquant ceux qui fuient une guerre mais quand on regarde les chiffres de l’OIM [Office internationale des Migrations] on voit qu’il y a un flux presque ininterrompu de migrants qui viennent d’Afrique de l’Ouest ; qui ne fuient pas une guerre mais veulent survivre tout simplement et qui tentent de rejoindre l’Europe dans des conditions absolument dramatiques. Je voulais mettre ce problème en lumière ». Claire Meynial a donc suivi leur route depuis la Gambie qui voit partir sa jeunesse -quelque 90 000 Gambiens vivent à l'extérieur de leur pays en 2015- sur une population de moins de 2 millions d'habitants - jusqu'à Agadez, au Niger, et ses ghettos de migrants.
La périlleuse traversée du désert
C'est à Agadez que l'on peut commencer à parler de véritable trafic, explique la lauréate. A la porte du Sahara les bus ne suffisent plus ; il faut pouvoir monter dans un pick-up, et payer des intermédiaires pour parvenir jusqu'en Libye, la dernière étape avant l'Europe. « A Agadez, au Niger, les conditions sont vraiment insalubres et surtout tout le monde a assisté à un départ de pick-up pour la Libye, en pleine nuit, tous feux éteints pour ne pas être repérés dans le désert ; et là vous voyez des gamins, des mineurs de 15-16 ans et on sait très bien que le Sahara est jonché de cadavres… Sur ce pick-up de 30 jeunes garçons qui partent, combien arriveront effectivement ? »
La journaliste a voulu comprendre et, aujourd'hui, elle dénonce l'image déformée de la vie de ce côté-ci de la Méditerranée qui anime ces candidats au départ. Son empathie à l'égard des migrants a touché les membres du jury qui ont également récompensé la cohérence du travail de Claire Meynial. La journaliste de son côté s'est référée à Albert Londres : raconter ce qui fait mal, mettre la plume dans la plaie.
► à (ré)écouter : la série de reportages Afrique de RFI sur les routes des migrants africains