Malika est venue avec trois amies. Malika, d'origine algérienne, arbore fièrement son autocollant « je suis Charlie », car pour cette maman d'origine musulmane, il n'est pas question de cautionner la violence. « Je suis fière d’être parmi la foule, on a tous été touchés ». « Il faut qu’on soit tous debout, y’en a marre de la terreur et de la barbarie », ajoute sa voisine.
Marre de la terreur, de la haine de l'autre. Même ces jeunes de banlieue, souvent stigmatisés comme délinquants, ont tenu à être présents à cette marche républicaine. « Moi, je viens du 93 (Seine-Saint-Denis, NDLR), lance un jeune homme. J’ai grandi avec tous ces gens. On est tous Français : je suis Français, né en France, et on ne veut pas donner une image de ce genre des Noirs ou des Arabes. La religion, ce n’est pas pour faire du mal aux gens ! »
Pas d'amalgame ! Les auteurs des deux attentats de Charlie Hebdo et du supermarché casher de la Porte de Vincennes , plus l'attaque meurtrière de jeudi à Montrouge, ont justifié leurs forfaits au nom d'Allah, pour « venger » le prophète, a dit l'un des meurtriers des caricaturistes. Mais les Français de confession musulmane présents dans la marche rejettent sans nuance cette lecture déviante de leur religion.
Le pari du « vivre ensemble »
D'autres témoignent de leur amour de la vie et de la liberté, comme Anomah, qui est Camerounais. « Moi, je tenais vraiment à être là pour montrer qu’en France, on a le droit de s’exprimer, de dire ce que l’on pense. Ce qui se passe en ce moment, ce n’est pas du tout bien : on est tous des humains, des pères de famille, on a des enfants. Je suis venu par un stylo, ce n’est pas un stylo qui peut entraîner un meurtre ! On est né pour vivre, on aime la vie et la liberté. »
Sylvain est pour sa part Mauricien. Il vit depuis 40 ans en France. Et pour lui, la France, c'est l'esprit de tolérance et de liberté d'expression. C'est pour défendre ces valeurs qu'il est venu. « C’est simplement pour le " vivre ensemble ", parce qu'aujourd’hui je vois la France qui bouge et on n'avait jamais vu ça, le monde qui bouge, partout, jusque dans mon pays à l’île Maurice. »
Pour tous ces Charlie, juifs, musulmans, arabes ou africains, la France doit aujourd'hui gagner son pari du « vivre ensemble ». Rencontré dans le cortège, Demba Diabara est le vice-président du Haut Conseil des Maliens de France. « Nous avons senti que le combat que nous menons est un combat juste, qui défend des valeurs universelles : la démocratie, la liberté d’expression et la République », dit-il.
Il se réjouit de voir l'affluence à la marche et son aspect cosmopolite.« Quand on voit cette masse qui se voulait une masse nationale et qui se retrouve être une masse mondiale, nous sommes convaincus que ce sont des valeurs universelles ». Le Mali est également victime du terrorisme. « Il était important pour nous de marquer notre solidarité avec le peuple français, peuple avec lequel nous sommes tous victimes du terrorisme. Vous savez bien que le Mali est aussi victime de ce phénomène. Il était important pour nous de venir apporter notre soutien pour la défense de la civilisation. »
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