Législatives tunisiennes: Ennahda déclare être arrivé deuxième

Les Tunisiens ont voté, dimanche 26 octobre 2014, pour élire leurs 217 députés, dans un scrutin proportionnel à un seul tour. Plus de 5 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes.  Le climat de ces deuxièmes législatives depuis la chute de Ben Ali, en 2011, aura été tendu. Les autorités redoutaient des attaques jihadistes. A la fermeture des bureaux de vote, le taux de participation était estimé à environ 60%. Et ce lundi, selon des projections sortie des urnes des différents partis, Nida Tounes l’emporterait devant le parti islamiste Ennahda.

Article mis à jour avec notre envoyé spécial à Tunis, David Thomson

Quelque 1 300 listes étaient en lice dans ces législatives tunisiennes. L'instance électorale en charge du scrutin a jusqu'à jeudi pour annoncer les résultats. L'issue du scrutin va s’en doute se jouer entre les deux principales forces politiques du pays, à savoir les islamistes d'Ennahda et les laïcs de Nida Tounes. D’ailleurs dès la fin de soirée dimanche, les premiers sondages de sortie d'urnes, d'abord ébruités par des cadres de Nida Tounes, puis diffusés par les médias tunisiens, ont donné Nida largement en tête. « Nous disposons des premières estimations qui sont positives pour Nida Tounes, notre parti pourrait être en première position. Nous ne pouvons pas parler des résultats des élections avant l’annonce officielle, mais un certain nombre d’indices nous rendent confiants. On est fier et ces résultats nous font plaisir. On attend l’annonce avant toute déclaration », a déclaré Béji Caïd Essebsi, le président du parti.

Une information qui semble désormais se confirmer avec les chiffres communiqués ce lundi par les représentants d’Ennahda. « Nous avons des estimations qui ne sont pas encore définitives. Nida Tounes est en avance de plus ou moins une douzaine de sièges », a déclaré Zied Laadhari, le porte-parole du parti islamiste. Sur les 217 sièges à pourvoir, Nida Tounes emporteraient 80 sièges et Ennahda environ 70.

Avant le scrutin, tous les analystes pronostiquaient ce face-à-face entre les islamistes et les modernistes, Nida Tounes apparaissant comme la seule véritable formation capable de rivaliser avec Ennahda. Ce deuxième scrutin de l’après-Ben Ali devait donc consacrer la bipolarisation de la vie politique tunisienne. Pour autant, le mode de scrutin proportionnel, à un tour, pourrait favoriser aussi les petites formations, qui pourraient ainsi se poser en arbitres. Les formations de l’opposition semblant capables de jouer un rôle sont les libéraux du Massar ou d’Afek Tounes, la gauche nationaliste du Front populaire, ou peut-être un « ovni politique », l'Union patriotique libre (UPL), d’un milliardaire autrefois proche du régime Kadhafi. Sans oublier bien sûr les anciens du parti du président déchu Ben Ali.

Un vote dans le calme et sans irrégularité majeure

Les électeurs tunisiens se sont finalement plus mobilisés qu'en 2011 lors du premier scrutin de l'après-Ben Ali. De longues files d’attente étaient visibles à Tunis dès l’ouverture des bureaux à 7h. Et ce, à la fois dans les quartiers bourgeois comme à la Marsa, ou d'autres quartiers beaucoup plus populaires comme Ettadhame. Puis l'affluence a eu tendance à diminuer en fin de matinée. Mais en fin de soirée, l'instance électorale ISIE évoquait un taux de participation de 61,8%. Selon les observateurs étrangers et tunisiens, le vote s'est par ailleurs déroulé sans irrégularité majeure sur l'ensemble du territoire, même si un certain nombre d'électeurs ont rencontré des difficultés relatives à leur inscription sur les listes électorales.

Deux jours après un affrontement meurtrier entre jihadistes et force de l’ordre en périphérie de Tunis, les autorités craignaient qu’un attentat ne perturbe ce processus démocratique. Environ 80 000 policiers étaient déployés dans l’ensemble du pays pour le vote. Des barrages routiers avaient été mis en place un peu partout et des agents armés de la Garde nationale sécurisaient chaque bureau de vote. Dans la matinée, quelques bureaux ont été fermés pour des raisons de sécurité dans la ville de Kasserine.

Incidents de vote relevés en France

En France, parmi les 180 000 électeurs tunisiens appelés à voter, certains ont fait part d'irrégularités et de manquements dans l'organisation du scrutin. Exemple avec Alia, Tunisienne vivant en France, qui devait voter à Paris. Il y a deux jours, elle a appris par courrier que son bureau serait en fait celui de Boulogne. Beaucoup de ses amis auraient vécu la même déconvenue, voyant leur bureau déplacé à plusieurs dizaines de kilomètres, voire en Tunisie.

Selon des électeurs s'exprimant sur Twitter, des bureaux de vote n'auraient jamais ouvert. Selon l'Instance régionale indépendante des élections tunisiennes en France, citée par l'agence de presse turque Anadolu, les bureaux de Laval, Brest et Lorient ont par exemple été déplacés à la dernière minute à Rennes ; celui du Havre à Rouen ; celui de Beauvais, à Creil. Elle n'a pas encore justifié ces problèmes d'organisation.

A Toulouse, une candidate rapportait vers 14h sur Twitter que l'opération de vote avait dû être suspendue à cause de mécontents empêchant l'accès au bureau de vote du consulat. A Asnières, en région parisienne, le président du bureau a rapporté que plusieurs personnes n'ont pas trouvé leur nom sur les listes une fois arrivés au bureau de vote.

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