Libye: un gouvernement nommé en catimini pour prévenir le chaos

Malgré l'élection du nouveau Premier ministre libyen, Ahmed Meitig, le chaos sécuritaire continue de régner dans le pays. La résidence de ce dernier a d'ailleurs été attaquée ce matin même. Le Parlement de transition libyen, le Congrès général national, a accordé sa confiance au nouveau gouvernement dimanche soir, mais le nouveau cabinet de 23 ministres, destiné à diriger le pays jusqu'aux prochaines élections législatives du 25 juin, n'est pour l'instant pas encore au complet.

Ahmed Meitig avait été élu, il y a deux semaines, lors d'une session parlementaire chaotique. Une élection dénoncée comme illégale par certains membres de la chambre. La question désormais est de savoir si ce renouvellement des autorités de transition peut enfin contribuer à ramener un peu de stabilité dans le pays en proie aux violences et à l'insécurité. Ce gouvernement, soutenu par les islamistes, reste contesté par les groupes laïcs faisant front autour de la personnalité de Khalifa Haftar, général rebelle. Le pays n'a - de plus - toujours ni armée nationale, ni Constitution.

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« D’abord, on a un gouvernement par défaut parce qu’on ne pouvait pas se permettre de ne pas avoir un gouvernement, sinon on allait assister à un vide politique et un vide constitutionnel très important puisque le pays va connaître des élections très importantes fin juin, explique Hasni Abidi, directeur du Centre d'études et de recherches sur le monde arabe et méditerranéen à Genève (Cermam). Le deuxième élément qui a précipité la formation d’un gouvernement aussi discrètement, c’est bien entendu la tentative de coup de force menée par le général Khalifa Haftar, et certains de ses miliciens ont menacé d’arrêter certains députés et même le gouvernement. Il fallait absolument remplir ce vide et constituer ce gouvernement pour dire que la Libye est bien dirigée par un gouvernement disant que la légalité institutionnelle est toujours en vigueur en Libye. »

Risque de partition du pays

Hasni Abidi ajoute que dans cette crise sans précédent que traverse le pays, ce qu’il reste de l’Etat ne peut prendre le risque de laisser la situation sécuritaire s'envenimer et provoquer une scission notamment à l'Est : « La situation est très critique et jamais la Libye n’a traversé une zone de turbulences sur le plan sécuritaire et politique, et même économique. Le pays est presque en défaut de paiement. Benghazi, évidemment, c’est le symbole de toute la région de l’Est et elle paie le prix fort de l’absence de l’Etat, de la centralisation du pouvoir à Tripoli, et de la non prise en considération de ses besoins par à la fois la milice de Misrata qui est importante et qui est une véritable armée dans l’Etat, et aussi par le gouvernement central. Evidemment, les assassinats sont aussi un élément très important qui risque d’amplifier un peu ce divorce entre la région de l’Est et Tripoli. Mais de là à vraiment imaginer une scission, ce serait grave et dangereux dans la mesure où la Libye ne peut pas se permettre le luxe d’avoir trois régions complètement indépendantes. »

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