RFI : Bonjour Françoise Larribe… Plus de 1 000 jours de prise d’otages, des rassemblements aujourd’hui dans plusieurs villes de France. Souhaitez-vous faire passer sur RFI un message à vos proches et aux autres otages ?
A travers ces rassemblements on veut leur dire que l’on est toujours très, très présents, qu’ils sont au jour le jour dans nos esprits. On veut leur dire aussi «résistez », et que derrière eux, il y a énormément de monde qui se mobilise.
Vous ne baissez pas les bras ?
Non ! Non, non... Moins que jamais, au contraire. Là on est dans une résistance. Et on espère que de leur côté, ils sont dans la même résistance et dans cette volonté de revenir à la maison.
C’est la saison chaude actuellement sur place. Les conditions sont difficiles. Etes-vous êtes inquiète pour leur santé ?
Nous sommes tous très inquiets pour leur capacité physique et morale, à tenir sur une longueur qui était impensable lorsque nous avons été pris comme otage ; saison chaude, saison des vents, avec des températures qui atteignent 50 degrés à l’ombre et des conditions matérielles difficiles, très difficiles.
Des informations ont été publiées dans la presse récemment. Elles indiquent que le contact aurait été renoué. Quelles informations avez-vous de votre côté ?
Lorsqu’on lit de telles informations dans la presse, cela nous redonne, si vous voulez, un regain d’espoir. Parce que l’on se dit : bon, le contact a été repris. On ne sait pas exactement s’il avait été abandonné ou s’il était toujours possible, puisqu’il y a eu la guerre entre-temps. Mais cela nous donne une petite lueur, en se disant qu’il y a peut-être une solution maintenant qui va être envisagée.
Les otages auraient été séparés et se trouveraient actuellement en Algérie?
Là, je ne peux pas infirmer ou confirmer l’information.
Vous êtes bien informée par les autorités françaises ?
Je suis informée, c’est-à-dire que je vous dis ce que vous savez déjà vous, puisque vous l’avez appris par la presse. Mais pas plus.
Vous aviez critiqué l’intervention française au Mali décidée par François Hollande. Quelle est votre position aujourd’hui sur cette intervention ?
Je ne dirais pas « critiqué ». Je dis simplement que nous avons exprimé la peur que cette intervention nous faisait vivre au quotidien. La peur pour nos proches, la peur pour les otages en général, parce qu’il y en a d’autres aussi. La peur pour leur vie, parce qu’on pouvait se dire que tout était possible et qu’ils pourraient être pris sous les feux. Et ça, ça nous faisait très peur.
Le président français a récemment annoncé que la France changeait de doctrine, comme on dit, en matière d’otages, et qu’elle ne verserait plus de rançon. Comment avez-vous accueilli cette annonce ?
C’est un élément important qui nous a été dit, que l’on a entendu. Actuellement nous, nous nous disons qu’il y a sûrement des solutions possibles et que ces solutions doivent être trouvées. Et c’est la seule chose qui nous importe actuellement, c’est qu’il y ait des résultats en termes de leur retour, par des solutions qui peuvent être diplomatiques, politiques… On ne sait pas, mais bon… Je pense que c’est à des professionnels de faire ce travail-là et il faut qu’il soit fait le plus vite possible.
Selon vous, ce dossier est bien géré ?
Mille jours de détention ne peuvent qu’apporter certains doutes dans les esprits et du moins dans les nôtres. Parce que cette attente est tout à fait insupportable. Et puis surtout, nous pensons à eux qui sont là-bas dans la même attente, mais qui est sûrement rendue encore plus difficile, parce qu’ils ne savent pas de quoi leurs lendemains vont être faits. Qu’est-ce qu’ils vivent... Et ça, c’est le plus compliqué, je pense.
Pourquoi avez-vous décidé de davantage parler et davantage médiatiser votre combat ?
Je crois que le temps parle pour nous. C'est-à-dire que nous avons gardé une extrême discrétion pendant pratiquement deux ans, que cette discrétion n’a donné aucun résultat. Et on s’est dit maintenant, voilà, qu’est-ce qu’on fait ? Et puis, je pense aussi que la guerre qui a sévi dans le Nord du Mali, nous a fait prendre conscience de l’extrême dangerosité de ce qu’ils vivaient et qu’il fallait quand même porter devant l’opinion publique la vie de ces hommes.
La libération des otages français au Cameroun vous a-t-elle redonné un peu d’espoir?
Nous étions heureux pour cette famille. Je sais que moi, j’ai reçu cette libération avec un énorme soulagement, comme toute la France d’ailleurs, parce que c’était une prise d’otages comme toutes les prises d’otages, particulièrement ignominieuse. C’est impensable déjà, que l’on puisse prendre des gens comme cela et décider de leur vie. Et là, en l’occurrence, c’était quelque chose d’énorme. Et nous étions ravis qu’une solution soit trouvée. Cela nous a redonné un regain d’espoir. On s’est dit : oui, cela a marché pour eux. Maintenant, il faut que ça marche pour nous.