Interpol s'attaque à la pêche illégale

L’organisation de coopération policière Interpol vient d’annoncer un plan mondial de lutte contre la pêche illicite, le 26 février 2013 à Lyon (centre-est de la France). Tous les océans sont concernés par ce vaste projet baptisé Scale. Aucune zone n’échappe en effet à cette pratique, dont on estime qu’elle entraîne jusqu’à 20 milliards d’euros de pertes financières pour l’économie mondiale.

C’est à l’occasion de la première conférence internationale d’Interpol sur l’application des lois relatives à la pêche que le projet Scale a été officiellement lancé le 26 février 2013. A Lyon, ce sont les autorités de plus de 55 pays qui sont réunies sous la houlette d’experts pour évoquer le problème de la pêche illégale.

Il faut dire que le problème est mondial, tous les océans sont concernés. Les répercutions économiques de la pêche illicite sont très importantes puisqu’on approcherait les 20 milliards d’euros de manque à gagner. Un chiffre mis en avant par l’ONG Pew Charitable Trust, qui finance en partie ce projet.

L’Afrique principale concernée

Si toutes les zones sont concernées, certaines le sont davantage, comme c’est le cas de l’Afrique subsaharienne. Près de 40% des poissons pêchés le long des côtes de cette région le seraient de façon totalement prohibée. Chaque jour, ce sont des tonnes de crevettes, sardines, thons et maquereaux qui sont capturés sans aucune autorisation.

Ces chalutiers causent un tort économique aux pays qu’ils pillent. Certaines populations de pêcheurs sont confrontées à une baisse des réserves halieutiques et donc une forte baisse de leur revenu. Avec un impact sur plusieurs millions de personnes, l’organisation de défense de l’environnement WWF estime que les pêcheries « apportent une contribution vitale à plus de 200 millions d’Africains ».

Des conséquences désastreuses sur l'environnement

Les conséquences de cette pêche illégale sont économiques mais aussi écologiques. Les stocks de poissons sont en déclin, « de nombreux stocks se sont effondrés et d’autres vont suivre », explique le biologiste Daniel Pauly de l’université de Colombie-Britannique au Canada. « Dans de nombreuses régions du globe, les mesures pour éviter la surpêche échoueront sûrement si les activités illicites ne sont pas également combattues », déclare pour sa part José María Figueres, ancien président du Costa Rica et actuel président de la Commission Océan mondial qui regroupe des personnalités politiques venant du monde entier.

La surpêche est l’une de ces pratiques illégales, tout comme la non-déclaration des captures, l’utilisation d’engins et de produits interdits ou encore la pêche sans autorisation. Elle rapporterait à ses auteurs chaque année entre 10 et 23 milliards de dollars, selon la Commission Océan mondiale. Des fonds qui servent à financer les activités criminelles.

Financement de la criminalité

Le Parlement européen soulevait déjà ce point dans un rapport qui date d’octobre 2011, soulignant l’implication de réseaux criminels dans la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN). Selon ce rapport, certains réseaux du crime organisé seraient impliqué dans de la pêche illégale, mais il s’agirait le plus souvent « de l’adoption de certaines de leurs techniques au profit de la pêche : traite des êtres humains, travail forcé, évasion fiscale, blanchiment d’argent, fraude douanière, corruption, écoulement de biens volés, etc. »

Le Parlement européen évoque aussi dans une certaine mesure les rapprochements qu’il peut y avoir entre les différents réseaux et comment certains savoir-faire peuvent alimenter plusieurs trafics. Des navires de pêche peuvent être notamment utilisés pour le trafic de drogue, d’armes voire le terrorisme.

Une meilleure coordination internationale

Interpol plaide donc aujourd’hui pour une meilleure coordination internationale dans la lignée de ses autres programmes sur les atteintes à l’environnement, tels que la lutte contre le trafic d’ivoire, le braconnage des félins sauvages, ou encore l’exploitation forestière illégale. Le projet Scale vise à faire reconnaitre la pêche INN comme un crime transnational.

A Lyon, désormais près de 25 personnes travaillent en permanence sur ces dossiers. Un chiffre dont se défend David Higgins, le directeur de Scale. « Cela semble peu. Pourtant, il y a quatre ans, j’étais tout seul sur l’ensemble des atteintes environnementales, précise-t-il au journalLibération. D’une manière générale, on sent que les Etats s’intéressent de plus en plus à ce sujet. » Un passage obligé pour avoir des résultats sur le terrain, car sans l’engagement des Etats et sans réelle volonté politique, une harmonisation mondiale des moyens de lutte ne peut être efficace.

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