Guinée-Bissau : vers un gouvernement d'union nationale sans le PAIGC et avec l'armée

Les dirigeants des principaux partis d'opposition se sont retrouvés, ce samedi 14 avril. La réunion portait sur la mise en place d'un gouvernement auquel ne participera pas le Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), dont les leaders ont été arrêtés. Initialement, les dirigeants politiques devaient également s'entretenir avec les auteurs du coup d'Etat, mais le rendez-vous a été repoussé à ce dimanche.

L'armée bissau-guinéenne avait appelé, dès le lendemain du coup d'État, la classe politique à se retrouver pour réfléchir à la constitution d’un gouvernement d’union nationale. Un gouvernement dans lequel l’armée conserverait tout de même la main sur les ministères de l'Intérieur et de la Défense.

Plusieurs partis politiques se sont effectivement réunis, ce samedi 14 avril à l’Assemblée nationale pour commencer les discussions. Selon l’un des participants, les échanges ont surtout porté sur la question du nouveau président de transition, suite à l’arrestation de Raimundo Pereira, le président par intérim. La rencontre devrait reprendre ce dimanche et évoquer cette fois-ci la distribution des postes au sein du « gouvernement d’union nationale ».

Le projet est pourtant loin de faire l’unanimité au sein de la classe politique. « Les dés sont pipés, explique l’un de ceux qui refusent l’habillage politique du coup de force. L’armée distribue les postes et nous considère comme ses pions ». Le Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), le parti du Premier ministre déchu Carlos Gomes Junior, exige de son côté « le retour immédiat à l'ordre constitutionnel » et la « reprise » du processus électoral qui était en cours.

Initialement, les dirigeants des partis politiques devaient s'entretenir avec les auteurs du coup d'Etat, et les représentants des différentes armes. Le rendez-vous a été repoussé à ce dimanche. Les leaders politiques doivent reprendre leurs discussions.

Vrai retour à l'ordre constitutionnel ou tentative de séduction

Dans un communiqué distribué ce samedi après-midi, l’état-major général des forces armées affirme justement, en dépit de la neutralisation très peu constitutionnelle du Premier ministre et du président par intérim, qu’il fait de gros efforts pour créer les conditions d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel.

La déclaration de bonne volonté ne s’arrête pas là. Les militaires disent qu’ils veulent aider à relancer la réforme des secteurs de le défense et de la sécurité - en dénigrant au passage ce que l’ancien gouvernement avait pu faire dans ce domaine. Ils affirment qu’il veulent en finir avec la culture chronique de l’impunité et ils assurent qu’ils veulent créer les conditions d’un démarrage des procès sur les assassinats politiques de ces dernières années. Un vrai discours de séduction vis-à-vis de la classe politique et de la communauté internationale mais dont la sincérité prête à caution dans le contexte actuel.

Normalisation

Crise politique ou pas, au marché Chapa de Bissau, les vendeurs des friperies sont revenus à même le sol. Les clients, eux aussi, sont là et déambulent entre les étals. Des vendeurs de pain se sont posés sur le bord de la route. Un peu plus loin, on trouve les marchandes de fruits. Mais l’activité n’a pas complètement redémarré. De lourdes portes métalliques cadenassées sont encore tirées sur de nombreuses boutiques, raconte un petit vendeur de recharges téléphoniques.

Dans les rues qui bordent la principale cible des militaires jeudi dernier, la maison du Premier ministre déchu, Carlos Gomes Junior, les habitants ne sont pas encore tout à fait remis des coups de feu et des explosions. Cet homme tente de limiter ses déplacements.

Le tronçon de route qui passe devant la résidence de Carlos Gomes Junior est gardé par un dispositif très léger. En guise de barrage, quelques pierres et une poubelle rouge. Une corde tendue entre deux arbres, abaissée et montée par un militaire enfoncé dans sa chaise en plastique. 48 heures après leur coup de force, les militaires se sont fait discrets. Pas de déploiement imposant, pas de patrouille spectaculaire.

 

Partager :