Présidentielle au Sénégal : Abdoulaye Wade investi candidat

Le chef de l’Etat sénégalais avait dit dès septembre 2009 qu’il souhaitait être candidat à sa propre succession lors de la présidentielle de février 2012. Il est désormais officiellement investi candidat par son parti, le PDS (Parti démocratique sénégalais) et par la coalition qui le soutient, les FAL 2012 (Forces alliées pour la victoire en 2012). Cette investiture a été proclamée à l’issue d’un congrès sans véritable suspense. Pendant ce temps, le Mouvement du 23 juin (M23), organisait de son côté un nouveau rassemblement contre cette candidature à un troisième mandat.

De nos correspondants à Dakar,

Dakar. Un grand hôtel. Une tente aux couleurs du PDS, bleue et jaune, plantée dans les jardins. C’est là que le parti tient son congrès. Ousmane Ngom, le ministre de l’Intérieur, vient de lire la résolution d’investiture d’Abdoulaye Wade. Des femmes montent à la tribune pour chanter les louanges du président sortant. Puis Abdoulaye Wade prend la parole, malgré un début d’extinction de voix : « Vous venez de m’investir candidat du PDS et de ses alliés. Je ne peux donc que vous remercier encore une fois et vous dire que j’accepte d’être votre candidat. » Les jeunes qui sont venus occuper les premiers rangs, survoltés, applaudissent à tout rompre. Le porte-parole du PDS, Babacar Gaye s’empare du micro : « Maintenant la cause est entendue ! Le secrétaire général du parti, leader des FAL 2012, a accepté la proposition faite par le congrès de faire de lui son candidat. Il n’y a plus à épiloguer ! »

Abdoulaye Wade, lui, entre immédiatement en campagne. « Nous assistons au Sopi triomphant. Je continuerai, promet-il, à créer, imaginer, construire des solutions innovantes qui ont fait de notre pays ce qu’il est aujourd’hui. » Il rappelle à l’auditoire son bilan, et parle de projets futurs. « Je vous indiquerai simplement que l’année prochaine naîtra la banque des paysans, c'est-à-dire la banque verte. »

Meeting d’investiture

Dakar, devant le siège du PDS. La foule commence à se rassembler sur la Voie de dégagement nord (VDN), qui passe là. Un meeting d’investiture est annoncé. Les baffles baignent l’assistance de la chanson « Goor gi dolli ñu », littéralement « le vieux, on en veut un peu plus ». L’attente prend des allures de kermesse. La foule déambule au milieu des préparatrices de poulet Yassa, des vendeurs de café touba, des joueurs de tambour. « Wade, notre président dès le premier tour 2012 », proclame un tee-shirt porté par un jeune.

Alors que le M23, l’organisation qui rassemble plusieurs organisations de la société civile et des partis d’opposition continue à contester la constitutionnalité d’un troisième mandat d’Abdoulaye Wade, le camp présidentiel, lui, soutient que le débat constitutionnel est dépassée. Son mot d’ordre : une victoire d’Abdoulaye Wade dès le 26 février 2012. « Premier tour, premier tour » fait scander à la foule un orateur pour occuper le temps en attendant Abdoulaye Wade.

Le président sénégalais arrive en début de soirée, saluant la foule depuis le toit ouvrant de son véhicule. Mais, cette fois-ci complètement aphone, il ne peut s’exprimer et doit faire appel à un porte-parole -au sens propre du terme- pour dire sa confiance dans la victoire : « Je gagnerai au premier tour ! » « Entrons en campagne électorale à travers le pays pour être chaque jour plus nombreux », lance Wade à ses sympathisants

« Congrès du peuple »

Dakar. Place de l’Obélisque. Le M23, qui rassemble ceux qui s’opposent à une nouvelle candidature d’Abdoulaye Wade, tient de son côté son propre congrès. Un rassemblement qu’il présente comme le « congrès du peuple ».

Sifflet autour du coup et carton rouge à la main, Abdou Guèye a quitté la banlieue dakaroise pour exprimer une fois de plus son désaccord avec la candidature d’Abdoulaye Wade. Il n’est pas militant dans une formation politique mais il a adhéré au Mouvement du 23 juin, pour mieux défendre les institutions de son pays : « Je suis d’aucun parti, dit-il, mais je suis Sénégalais, donc je défends ma constitution. Je suis pour la justice et pour la transparence. »

Dans la foule, il y a bien sûr des militants de partis de l’opposition. Et une bonne poignée de jeunes déçus par le régime de l’alternance. « Le pays est à genou : la corruption gangrène tous les secteurs, les jeunes chôment. A l’université, nous sommes diplômés, mais nous n’avons pas de boulot jusqu’à présent », soupire Lamine Mané, un étudiant.

Autour de la place de l’Obélisque plusieurs groupes de jeunes brandissent des pancartes hostiles au régime en place : « Alerte : Wade = Khadafi » ou encore « Faux pas forcé », le slogan lancé par le mouvement Y en a marre.

Sur le podium, les leaders appellent à maintenir la pression. « Nous devons maintenir cette mobilisation pour montrer au Conseil constitutionnel que le peuple ne veut pas de la candidature de Wade ! Il n’y aura jamais de 3ème mandat de Wade ! », lance Alioune Tine, le coordonnateur national du M23.

Le congrès s’est achevé par un concert donné par plusieurs rappeurs engagés contre un nouveau mandat de Wade.

 

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